Olangar, une cité en flammes – Clément Bouhélier

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Ces derniers temps sur Twitter, on parle beaucoup de fantasy. Que ce soit à travers les résultats de l’observatoire de l’imaginaire ou à cause de ce nouveau podcast qui, pour ne pas changer, se concentre surtout sur les auteurs anglosaxons dont on parle depuis déjà plusieurs décennies. À croire qu’il n’y a aucune nouvelle voix valable dans ce genre littéraire… Ce serait oublier que les plumes francophones ont aussi du talent ! Et si vous avez besoin d’une preuve, je vous recommande de vous tourner vers les ouvrages de Clément Bouhélier.

C’est en 2019 que j’ai lu pour la première fois la plume de cet auteur avec Bans et Barricades, un tome coupé en deux parties, publiées chez Critic et qui devait normalement se suffire à lui-même. Le succès de l’ouvrage en a décidé autrement comme l’auteur l’explique dans les remerciements de ce volume. Les retours des lecteur·ices, les encouragements de sa maison d’édition ainsi que l’évidence : certains personnages avaient encore des choses à régler. Ainsi vint Une cité en flammes. Un dernier tome conclut (définitivement ?) cette saga, que je compte lire bientôt.

De quoi ça parle ?
Cinq années après les évènements détaillés dans Bans et Barricades, une nouvelle menace pèse sur Olangar. Les elfes sont sur le point d’entrer en guerre contre le royaume qu’ils accusent de la pollution de leur fleuve. Deux nains, Kalin et Nockis, sont envoyés dans une ville toute proche pour enquêter. Pendant ce temps, Evyna d’Enguerrand fait face à un attentat et est décidée à trouver les coupables… Tout serait-il lié ?

Une écriture précise et détaillée.
Clément Bouhélier met son écriture au service de son vaste univers. Il prend le temps de détailler tout ce qui se passe, au niveau du décor, des pensées des personnages, des liens à créer entre les différents éléments, accompagnant ainsi son lectorat pas à pas dans la compréhension de l’intrigue. C’est quelque chose qui me dérange en règle générale car cela me donne le sentiment que l’auteur essaie de penser à ma place, d’imaginer pour moi, de me dicter mon propre point de vue. Pourtant, pour une fois, je n’ai eu aucun problème à lâcher prise et à être spectatrice de ma lecture. Je me suis laissée porter par cette plume précise sans être lourde ou redondante. Au contraire, elle est soignée, chaque mot parait réfléchi.

Un univers original et des thématiques nécessaires.
Cette plume se met au service d’un univers de fantasy qui sort du lot. J’en avais déjà parlé précédemment mais on a tendance à associer la fantasy à un cadre moyenâgeux et il est vrai que beaucoup de ces récits y prennent place. Clément Bouhélier choisit de placer des races issues du bestiaire classique du genre (elfes, nains, orcs) dans un cadre de révolution industrielle, une révolution qui continue son bonhomme de chemin avec les ravages sociaux et environnementaux que l’on connait.

Ce tome-ci se concentre d’ailleurs sur ces deux questions. D’un côté, on voit que quelqu’un empoisonne volontairement le fleuve elfique afin de provoquer une guerre mais on apprend aussi que les lieux supposés exister pour traiter les déchets de l’industrie n’existent pas. Ces considérations agissent malheureusement en miroir de notre propre société. De plus, la volonté de relance économique et de création d’emploi par la Chancellerie pousse celle-ci à accepter la création de zones économiques particulières qui ne sont pas soumises à l’autorité des syndicats, ce qui donne évidemment lieu à des dérives dans les conditions de travail. L’auteur est quelqu’un d’engagé et cela traverse tout son roman sur encore d’autres questions d’actualité comme la corruption des classes dirigeantes ou l’importance du contrôle des communications au sein d’un état / d’un pays. Cet engagement se ressent au point que, parfois, les antagonistes manquent de nuance. D’un autre côté, ils en manquent parfois aussi dans notre réalité…

Au final, les ingrédients d’une Cité en flammes sont identiques à ceux de Bans et Barricades. Ils fonctionnent toujours aussi bien ensemble et on y retrouve le même petit défaut que je soulevais déjà à l’époque, à savoir que certaines scènes sacrifient la cohérence pour le grand spectacle. Je pense notamment à ce qui se déroule dans le dirigeable… C’est un peu dommage vu l’intelligence de l’intrigue proposée et l’implacabilité de celle-ci. Personne n’est à l’abri… Ou presque ? J’ai aussi regretté la relation entre Keiv et Evyna qui me parait artificielle mais c’est purement personnel et ça n’entache en rien l’intérêt du récit.

La conclusion de l’ombre :
Avec Une cité en flammes, Clément Bouhélier reste dans la lignée qualitative de Bans et Barricades, reprenant l’intrigue cinq ans après les évènements narrés dedans. Son univers de fantasy original qui s’inscrit dans une révolution industrielle reste une grande force et un terrain de jeu idéal pour parler de politique sociale, de guerre et d’écologie. Ses romans sont des pavés qu’on savoure sans aucune modération. À lire !

Merci à Phooka et Dup pour ce gain du prix Bookenstock ainsi qu’à Critic pour l’envoi.

Mes autres chroniques sur les œuvres de cet auteur : Bans et Barricades 1Bans et Barricades 2.

D’autres avis : Le nocher des livresLe bibliocosmeBookenstockLe culte d’ApophisAu pays des cave trolls – vous ?

Informations éditoriales :
Olangar, une cité en flamme par Clément Bouhélier. Illustration de couverture : Sébastien Morice. Éditeur : Critic. Prix : 24 euros.

8 réflexions sur “Olangar, une cité en flammes – Clément Bouhélier

    • Il y a des mystères comme ça ! Puis on ne peut pas tout lire mais je pense que si tu as l’occasion, essaie d’autant que Olangar est dispo en poche depuis quelques mois donc le coût sera abordable. Il faut commencer par Bans et Barricades en deux tomes puis celui ci 🙂

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  3. Je profite du fait d’être bloqué en attendant que ma voiture soit dispo (contre visite du contrôle technique, on espère que cette fois c’est bon !) pour lire cet article.

    J’ai trouvé ça fort intéressant (et j’ai rit à la remarque sur les « antagonistes » de notre monde qui manquent aussi de nuances). Mais je suis pas sur d’avoir le public pour au travail malheureusement. A voir.

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