À l’ombre du Japon #58 { Country Girl }

Début de cette année, j’ai eu le plaisir de rencontrer les éditions Chatto-Chatto au détour d’un petit stand sur un salon manga montois. J’avais déjà entendu parler d’eux ou croisé l’un ou l’autre titre sur les réseaux sociaux mais je me méfie toujours un peu des « nouveaux » éditeurs (mangas comme romans), ayant souvent été déçue par leur travail et leur manque de professionnalisme.  Toutefois, le responsable éditorial m’a semblé aussi sympathique que passionné, je me suis donc laissée tenter par quatre titres dont Country Girl d’une part parce qu’il s’agit d’une série courte mais également parce que les thématiques présentées me parlaient. Les histoires d’amitié, ça marche toujours pour moi ! Me voici donc partie, avec succès, à la découverte de cette série et de cet éditeur dont je n’aurais plus peur d’acheter les titres à l’avenir.

De quoi ça parle ?
Country Girl met en scène un groupe de quatre amis qui vit dans la campagne nippone, dans un lieu de plus en plus déserté et par la jeunesse et par les gens de manière générale si bien que leur collège n’a plus beaucoup de moyens financiers. Mikihiko rêve de s’en aller pour suivre des études à la capitale, il propose donc à ses trois amies (Miya Natsuki, Keiko Futatsumori et Iyo Hikawa) de passer le concours d’entrée dans un prestigieux lycée tokyoïte afin qu’ils puissent s’y rendre tous ensemble. Le problème c’est que Mikihiko échoue malgré ses excellents résultats au collège, ainsi qu’Iyo…

Des thématiques poignantes.
En seulement deux tomes, Country Girl parvient à brasser énormément de thématiques actuelles qui me touchent sur un plan personnel comme la façon dont on peut gérer un échec alors que tout l’avenir qu’on imaginait dépend de notre réussite, les évènements de la vie qui font qu’on s’éloigne des gens qu’on aime, la difficulté de sociabiliser avec de nouvelles personnes quand on a le coeur encore accroché dans le passé, la nécessité d’avancer pour se créer de nouveaux beaux souvenirs alors que les anciens se rappellent à nous… Country Girl est une tranche de vie dans toute sa splendeur qui met évidemment l’action sur le développement psychologique de ses quatre protagonistes. Aucun ne prend le pas sur l’autre, ils ont tous leur place dans cette histoire et ont tous la même importance au final. J’ai apprécié cet équilibre car souvent, dans ce type de manga, un couple ressort ou on oublie des personnages mais ce n’est pas le cas ici.

L’histoire commence à la fin du collège et nous permet de rencontrer les quatre personnages principaux :
– Mikihiko, un garçon doué en sport comme à l’école qui rêve de quitter sa ville de province pour la capitale mais va malheureusement échouer aux examens et tomber en dépression.
– Miya, une jeune fille pétillante et extravertie qui va réussir à entrer dans le lycée de la capitale et se rendre compte des difficultés que cela implique, rappelant que le système scolaire japonais est vraiment très dur.
– Keiko qui avait également réussi les examens mais n’a pas pu s’inscrire au lycée car elle a été hospitalisée pendant plusieurs mois à cause d’une maladie dont elle a fini par se remettre. La seconde partie de l’histoire commence quand elle sort de l’hôpital après avoir raté tout un trimestre et qu’elle se rend compte que Mikihiko ne va plus à l’école et qu’Iya, la dernière protagoniste, a beaucoup changé elle aussi…
– Iya, une adolescente assez réservée et taiseuse qui se retrouve seule dans le lycée de campagne et qui a du mal à s’ouvrir aux autres. Je me suis particulièrement identifiée à Iya car si elle était très proche de ses trois amis, une fois ses repères disparus, elle a modifié sa personnalité pour essayer de se faire de nouveaux amis mais se pose beaucoup de questions sur son identité, sur qui elle est vraiment. Je me suis revue à l’adolescence et, forcément, ça a fait remonter des choses.

En constatant les changements qui ont eu lieu chez ses amis, Keiko va tout tenter pour aider Miki à revenir au lycée et elle aura pour cela besoin d’aide… C’est finalement le fond de l’histoire. Si vous vous attendez à de grands drames, passez votre chemin. Country Girl évoque les difficultés du quotidien sans excès, avec justesse. Pour ne rien gâcher, le chara-design est superbement soigné ce qui favorise l’immersion quoi qu’il reste assez générique. On ne retrouve pas le trait particulier d’un auteur mais ça ne me dérange pas parce que j’aime beaucoup ce style, ça me parle.

Il ressort un diptyque de qualité qui séduira, je pense, les adeptes de tranche de vie nippone axée sur l’amitié. Je vous le recommande chaudement, d’autant plus que la série est finie sur deux tomes. Ce serait dommage de se priver !

D’autres avis : pas chez les blogpotes.

Informations éditoriales :
Country Girl (série en deux volumes) scénario par Ryukishi07 et Tanaka Romeo. Dessin par Tatsuhiko. Traduction par Marylou Leclerc. Éditeur français : Chatto-Chatto. Prix : 7,95 euros.

À l’ombre du Japon #56 { Premier contact avec Horimiya }

Parfois, il m’arrive de lire une romance / tranche de vie dans un lycée. C’est une période de la vie qui m’intéresse beaucoup et dont je suis par moment nostalgique. Pourtant, je me méfie parce que c’est rare pour moi d’y trouver mon compte. Avant de me lancer dans Horimiya, j’ai donc lu le premier chapitre en ligne sur le site de l’éditeur et j’ai tout de suite accroché autant au dessin qu’au principe.

Au moment où je rédige cet article, j’ai déjà lu 6 tomes. 16 en tout sont prévus, la série est terminée au Japon. Dans cet article, je souhaite revenir sur ce qui me plait dans cette série mais aussi sur deux éléments potentiellement « red flag » pour moi.

De quoi ça parle ?
À l’école, Kyôko Hori est une lycéenne aimée de tous pour sa gentillesse et ses bons résultats. Malheureusement, ses parents sont souvent absents et elle doit s’occuper de son petit frère, ce qui l’empêche de sociabiliser en dehors de l’école et d’avoir une adolescence normale. Personne n’est au courant de cela, jusqu’à ce qu’Izumi Miyamura le découvre par accident…

Miyamura est quant à lui un jeune homme qualifié de bizarre par les autres lycéens. Il a des tatouages et des piercings, juste parce qu’il aime ça (et non parce qu’il appartient à une bande de yakuzas !). Au collège, il était très seul et souffrait visiblement de tendances suicidaires. En entrant au lycée, il s’est fait petit à petit des amis notamment Hori, qui deviendra ensuite sa copine. Grâce à ces gens qui lui portent un intérêt sincère, Miyamura commence à accepter ses qualités et prendre conscience de sa valeur.

L’histoire d’amour entre Hori et Miyamura se développe lentement et pendant les cinq premiers tomes, on est plutôt sur une tranche de vie qui parle de la difficulté pour les adolescents d’être soumis trop tôt à de trop lourdes responsabilités et au poids du regard des autres. Leurs sentiments grandissent tout en douceur et c’est très intéressant. La tension narrative est bien gérée ainsi que la manière dont leur intimité est mise en scène, avec subtilité et ce qu’il faut d’ellipse pour qu’on comprenne ce qui a pu se passer entre eux sans pour autant tomber dans le vulgaire ou le voyeurisme.

Autour de Hori et Miyamura gravitent une série de personnages attachants qui sont autant d’intrigues secondaires. Pour une fois, celles-ci ne prennent pas le dessus sur le couple principal qui, jusqu’ici, reste au centre de la série. Ils sont assez prometteurs et je suis curieuse de savoir comment iels vont continuer d’intervenir dans les vies d’Hori et de Miyamura.

Du positif, mais…
Je l’ai dit en introduction, deux éléments m’inquiètent quant à la suite de la série et à la tournure que prendra celle-ci. Il y a d’abord cette fille exécrable introduite dans le tome 4 qui est amoureuse de Hori (elle sort littéralement de nulle part…) et donne lieu au premier « red flag » du manga par son comportement mais aussi par les réactions de Hori et de Miyamura face à elle. La première se montre plutôt gentille et ne la repousse pas très fermement, ce que je ne trouve pas hyper sain que ce soit par souci de respect au sein de son couple mais aussi parce que ça laisse à cette fille la possibilité de se bercer d’illusions… Miyamura est évidemment jaloux et se sent mis en danger car Hori n’est pas sécurisante puisqu’elle invite cette fille chez elle et veut qu’elle et Miyamura deviennent amis alors qu’elles ne se connaissent ni d’Eve ni d’Adam (ou alors c’est vraiment mal expliqué dans le manga papier…) ce que je n’ai pas compris. Pourquoi ? Je ne cherche pas à dire que c’est à la figure féminine de se montrer rassurante mais la situation aurait été inversée que j’aurais tenu le même discours. Il y a un manque de respect assez évident. Disons que c’est peut-être un souci culturel…

Le second « red flag » concerne encore Hori et il s’agit de sa violence physique. Elle passe son temps à distribuer des coups, d’abord à son père qui apparait dans le tome 4 du manga (et qui ressemble plus à un ado attardé qu’autre chose) ce qui est déjà surprenant même s’il s’agit d’un ressort comique plutôt convenu et connu. Je pense spontanément au père d’Ichigo dans Bleach où ils se collent mutuellement des coups sans arrêt et j’admets que dans ce cadre-là, je n’avais pas été choquée -ce qui me pose question. Le souci c’est qu’elle fait aussi preuve d’abus envers Miyamura, déjà rien qu’en se permettant de consulter les messages de son téléphone (que tu aies ou non quelque chose à cacher, je trouve que ça ne se fait juste pas). Quand elle croit en trouver un d’une autre fille, ils se disputent et elle le frappe puis elle le griffe, si bien que Miyamura a un pansement sur la joue le lendemain en cours mais c’est tourné à la plaisanterie. Je sais que culturellement parlant, au Japon, ça doit être difficile à admettre qu’une femme puisse frapper un homme mais ça arrive et c’est de la maltraitance. Même si Hori n’a pas de mauvaises intentions, même si elle s’excuse et même si elle a trop de pression sur les épaules. Je n’aurais pas eu de soucis à ce que cet évènement se produise mais seulement si on le montrait comme problématique, ce qui n’est pas explicitement le cas quoi qu’un ami de Miyamura lui conseille de ne pas laisser passer et de recevoir des excuses de la part de Hori. En tout cas ça ne l’est pas dans le tome 6 mais peut-être que ça le deviendra, je laisse donc le bénéfice du doute.

Hori n’est toutefois pas la seule à user de violence. Miyamura dévoile par moment cette facette de lui même si ce n’est jamais à l’encontre de Hori et plutôt envers son meilleur ami du collège. Je ne sais pas trop si cette banalisation des coups est voulue ou non, si elle va par la suite raconter quelque chose, si ce n’est qu’un effet qui se veut « comique »… Mais ça m’interpelle et ça me questionne.

La conclusion (temporaire) de l’ombre :
Ces deux red flags me gênent dans ce manga mais ils ne parviennent pas à éclipser la douceur (je sais ça peut paraître paradoxal) des sentiments entre Hori et Miyamura, ni la manière dont l’amour est mis en scène dans leurs interactions ou chez les personnages secondaires. C’est un titre beau graphiquement (je suis parfois siiii superficielle…) qui n’idéalise pas la vie pour autant et pose d’intéressantes questions sur l’adolescence mais aussi sur l’avenir. J’ai envie de continuer ma lecture pour savoir comment s’achèvera leur histoire car ils ont vraiment pris vie pour moi, je me sens concernée par eux. Affaire à suivre, on en reparlera sûrement une fois la publication achevée chez nous !

Informations éditoriales :
Horimiya, titre dessiné par Daisuke Hagiwara et scénarisé par HERO. Traduction en français par Gaëlle Ruel. Éditeur VF : Nobi-Nobi dans sa collection Genki. Prix par tome : 7,20 euros. Série finie au Japon en 16 tomes.

À l’ombre du Japon #54 { Premier contact avec Iruma à l’école des démons }

Ohayo mina-san !
Voici quelques semaines que je découvre tranquillement le manga Iruma à l’école des démons. L’Apprenti Otaku en parlait depuis longtemps mais il a fallu attendre les 48h BD et son premier tome à 2 euros pour que je lui laisse sa chance. À l’heure où j’écris ces lignes, j’ai déjà lu les six premiers volumes et je dois avouer bien accrocher. J’en suis la première surprise car en général, la ligne éditoriale de cette maison d’édition ne colle pas trop à mes goûts, je la trouve trop jeunesse. Et pourtant…

Notez que ce billet a pour vocation de partager mes impressions plutôt que de véritablement poser une analyse. J’ai envie de parler de ce manga depuis des semaines pour vous transmettre, je l’espère, mon enthousiasme à son sujet… Je précise également que toutes les images utilisées dans l’article sont la propriété de Nobi-Nobi et d’Osamu Nishi, elles sont présentes à seul but d’illustration de mon propos.

De quoi ça parle ?
Iruma a 14 ans et a été vendu par ses parents indignes à… un démon. Et pas n’importe lequel, l’un des plus puissants des Enfers, qui est aussi le proviseur de Babyls, une école pour jeunes démons. Rassurez-vous, Iruma va très bien et celui qu’il appelle Papi ne voulait rien d’autre qu’un petit-fils à gâter. Le seul souci c’est qu’Iruma est un humain et doit cacher sa nature au risque de finir dans l’estomac d’un de ses camarades…

Un héros attachant.
Souvent je reproche aux shônens des héros un brin stupide, casse-cou, qui foncent dans le tas sans réfléchir et ne comptent que sur leur force brute pour affronter des ennemis toujours plus puissants et atteindre un objectif qui, souvent, les placera au-dessus des autres (Naruto veut devenir hokage, Luffy veut devenir le roi des pirates, bon je grossis le trait mais vous voyez ce que je veux dire). Iruma est complètement à l’opposé alors que le titre coche toutes les cases des critères du shônen dans sa construction. Quel paradoxe ! Comme quoi, il suffit d’une exécution bien menée, même avec des ingrédients déjà bien connus…

Naïf, profondément gentil, Iruma est une bonne poire que tout le monde exploite et qui a le cœur sur la main. Habitué aux catastrophes, il a développé une incroyable capacité d’esquives qui lui permettra de s’imposer par complet accident au sein de sa classe. Le qui pro quo est vraiment le cœur de ce récit. Plus c’est absurde et improbable, plus ça passe !

Iruma est un garçon porteur de fortes valeurs qui a pourtant été maltraité toute sa vie par des parents négligents, ce qui l’a obligé à mûrir plus vite. Ironiquement, c’est en arrivant en Enfers qu’il va pouvoir se trouver une famille, nouer des amitiés et enfin vivre la vie d’un adolescent « normal ».

Une galerie de personnages qui n’est pas en reste.
C’est sans doute une des plus grandes forces de ce manga. Dans les six premiers volumes, on rencontre divers personnages qui deviendront plus ou moins importants dans la vie d’Iruma. Ses deux meilleurs amis déjà : Alice Asmodeus qui est le démon le plus prometteur, utilisateur d’une magie de feu, il se fait vaincre par Iruma dans le premier tome, d’une telle manière qu’il décide de l’appeler Maître et de le servir, ainsi que Clara Valac qui est une tornade vivante avec la capacité de sortir de sa poche tout objet qu’elle aurait déjà vu. Ce trio explosif va rencontrer d’autres protagonistes dont Amélie, la cheffe du BDE (bureau des élèves) que je trouve particulièrement savoureuse dans son dilemme car elle soupçonne très vite Iruma d’être un humain. Pour s’en assurer, elle lui donne à lire un ouvrage interdit qui vient de son monde et s’avère être un manga d’amour… Une routine s’installe alors entre eux où Iruma lui fait la lecture des tomes dont elle ne pouvait comprendre que les images jusqu’ici puisque les démons ne parlent pas les langues humaines et ne connaissent en réalité pas grand chose à leur monde. L’idée est toute simple mais vraiment judicieuse.

Outre ceux-ci, on peut également souligner le professeur Callego Naberius au très mauvais caractère qui se retrouve serviteur d’Iruma par accident ce qui donne lieu à des situations hilarantes. En effet, au début de l’année scolaire, les étudiants doivent se lier avec un familier mais comme Iruma est humain (ce qui personne ne sait) il fait d’un démon son familier et ce démon, c’est justement le professeur présent… Oups ? Il m’a spontanément fait penser à une parodie de Severus Rogue par son attitude, je me demande de quelle manière il va évaluer. Je me dois aussi de parler d’Ali, la bague d’Iruma, qui est devenu mon personnage préféré avec Amélie dés l’instant de son apparition. J’ai tellement hâte de savoir ce qui lui arrivera ensuite !

Notez qu’il faut attendre le quatrième tome pour rencontrer le premier antagoniste qui nous rappelle que nous sommes dans un monde démoniaque… et c’est tant mieux ! J’ai beaucoup aimé la manière dont l’autrice met en scène les désirs de ce personnage ainsi que la résolution de la situation. Cela ne signifie pas que les trois premiers manquent d’intérêt, au contraire. Ils se concentrent simplement sur la présentation du monde et les relations entre les personnages.

Une ambiance démoniaque ?
Malgré le pitch de base assez triste (un enfant se fait quand même vendre par ses parents…), le manga ne tombe jamais dans le mélodramatique. Les situations décrites dans les premiers tomes servent surtout à présenter l’univers et ses principes comme le fonctionnement de l’école, les rangs démoniaques, les différents cours, les clubs (appelés batoras) etc. toujours sous un angle amusant sans être lourd. Quand on a un manga qui parle de démons, on a généralement deux solutions : soit quelque chose de très sombre, soit une parodie. Iruma à l’école des démons se retrouve entre les deux car si les situations comiques s’enchaînent (sans lourdeur, je le rappelle) et que la mangaka met en scène des démons adolescents, en toile de fond, il y a quand même des situations plutôt difficiles comme le fait que les parents d’Iruma le vendent pour de l’argent ou les pulsions que ressentent certains démons… Il suffit de voir pour quelle raison Kiriwo souhaite détruire l’école ! C’est une pulsion qu’on comprend et conçoit très bien de la part d’un démon. Pourtant, ça reste assez violent et dénué de compassion ! L’ensemble est présenté d’une façon dédramatisée mais il n’empêche que ça me rappelle l’excellent Dolorine à l’école d’Ariel Holzl qui opte pour un ton semblable.

La conclusion de l’ombre :
Vous l’aurez compris, mon premier contact avec Iruma à l’école des démons s’est très bien passé et j’en redemande ! Je trouve l’univers proposé riche et prometteur, les personnages attachants et le dessin vraiment propre et dynamique. De plus, le rythme de publication en français est assez soutenu chez Nobi Nobi (un tome tous les deux mois) ce qui permet de suivre sans trop de frustration. Je compte me mettre à jour bientôt et peut-être réécrire d’autres articles sur le sujet notamment pour analyser le personnage de Kiriwo (j’attends de voir s’il va réapparaître) que j’ai trouvé particulièrement intéressant ou revenir sur la relation entre Iruma et Amélie (mais vu qu’il s’agit d’un shonen, je ne me fais pas trop d’illusions…) bref vous l’aurez compris, je suis très enthousiaste sur cette série et je vous encourage à la découvrir si ce n’est pas déjà fait.

D’autres avis : L’Apprenti OtakuMa vie de bib’ – vous ?

Informations éditoriales :
Iruma à l’école des démons par Osamu Nishi (dessin et scénario). Éditeur VF : Nobi-Nobi. Traduction : Yohan Leclerc. Prix par tome : 7,20 euros.

À l’ombre du Japon #52 : { Retour sur le trop sous-estimé « Reine d’Égypte » }

En avril 2022, Ki-oon a mis un point final à la publication de la série Reine d’Égypte scénarisée et dessinée par Chie Inudoh. Ce fut l’occasion pour moi de relire les huit tomes avant de me lancer à la découverte du neuvième. Il faut dire que je lis la série depuis la sortie du premier en mars 2017. Je me rappelle très bien mon premier contact avec cette couverture que je trouvais peu attirante lors de Livre Paris. Je m’y trouvais en tant qu’autrice et Chie Inudoh avait été invitée par Ki-oon. J’ai fait la file pendant plus de deux heures avec des amis pour récupérer une signature à offrir à Kazabulles. Du coup, pour passer le temps, on a lu le premier tome dans la file et je suis tombée sous le charme.

Un charme qui est resté intact tout au long de la série.

Comme je vais évoquer l’ensemble, il est évident que ce billet comportera des éléments d’intrigue. Vous êtes prévenu·es ! Je précise également que les extraits du manga photographiés dans cet article appartiennent à Chie Inudoh et à Ki-oon, ils ne sont utilisés que pour appuyer mon propos sur le manga. 

De quoi ça parle ?
Hatchepsout se marie avec son frère Séthi qui devient le pharaon Thoutmosis II. Une nouvelle ère se dessine pour l’Égypte… Mais pas comme on l’imagine ! En effet, Hatchepsout rêve de devenir pharaon afin de suivre les pas de son père. Elle a de grands projets que personne n’écoute car elle est une femme… Elle va donc devoir se battre pour parvenir à ses fins.

Une œuvre profondément féministe.
S’il y a un questionnement qui traverse Reine d’Égypte, c’est bien celui qui concerne l’égalité entre les hommes et les femmes. Hatchepsout ne comprend pas en quoi son sexe biologique l’empêche d’être un aussi bon pharaon que son frère, qu’elle bat d’ailleurs à la lutte et au tir à l’arc. Elle refuse d’être réduite au rang d’épouse ou de mère, elle aspire à davantage et se débat dans sa réalité sociale pour parvenir à changer les mentalités.

Les neuf tomes sont traversés par un questionnement sur le genre. Une fois devenue pharaon, Hatchepsout va s’habiller comme un homme et clamer que son âme est celle d’un homme, enfermé dans un corps de femme. Pourtant, plus on avance et plus la questions se pose : pourquoi ne pas simplement rester femme et se battre pour avoir le droit d’être et puissante et de sexe féminin ? L’évolution de sa réflexion est intéressante et nuancée. On la voit sans cesse tiraillée entre l’image de pharaon et sa féminité qui s’exprime dans l’amour qu’elle porte à sa fille unique, conçue malgré elle, et à l’architecte Senmout, le seul homme qu’elle aimera jamais. Il faudra attendre d’arriver à la toute fin pour qu’une jeune fille, rencontrée au crépuscule de sa vie, s’étonne d’apprendre que le pharaon est une femme et lui adresse cette remarque pleine de bon sens :

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C’est finalement la société qui l’empêche d’être à la fois femme et dirigeante. L’autrice met très bien en scène la puissance dévastatrice du regard des autres, au point que Hatchepsout sacrifie son bonheur personnel à son ambition de paix et de prospérité.

Une œuvre qui s’inscrit dans le temps.
Le premier tome nous fait découvrir Hatchepsout enfant et on la retrouve dans le dernier au seuil de la mort. Plusieurs années passent parfois entre deux chapitres, ce qui permet de brosser un portrait de sa vie qui soit dynamique et évolutif. Tout prend forcément plus de temps dans l’Égypte ancienne, que ce soit les constructions, les échanges diplomatiques et commerciaux, le gain en âge des enfants… On suit ainsi les personnages tout au long de leur existence et on voit de quelle manière le règne d’Hatchepsout change les choses puisqu’au contraire de ses prédécesseurs, elle pense que la grandeur de l’Égypte n’a pas à se bâtir sur la guerre mais bien sur le commerce. Dans cet ordre d’idées, elle va tendre la main aux pays voisins, développer des routes commerciales sur la terre comme sur la mer, ce qui va permettre à l’Égypte de gagner en puissance et en prestige. Du moins, sur le papier car son genre posera toujours problème. Pour gagner les siens à sa cause, elle ira jusqu’à se rendre sur le champs de bataille et tuer de ses mains sans hésitation.

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La notion de temps est d’ailleurs importante dans le récit et elle revient souvent. Les pharaons rivalisent d’ambition et d’imagination afin de laisser une trace de leur passage sur terre. Hatchepsout se demande souvent comment les générations futures vont la considérer, ce qu’on va retenir de son règne, comment est-ce qu’on va la représenter. La fin n’en est que plus tragique puisque, comme nous le montre le chapitre final, toute trace de son existence va être effacée par ses petits enfants qui refusent qu’on se rappelle d’une femme pharaon, pour diverses raisons que je vous laisse découvrir. J’ai ressenti un pincement au coeur et énormément d’empathie envers Hatchepsout même si je n’ai pas toujours été en accord avec ses choix. J’ai vraiment été passionnée par elle, sa vie et les problématiques qu’elle soulevait.

Un manga historique ?
L’autrice explique que l’existence d’Hatchepsout n’a été découverte qu’assez tard, tout comme sa momie. Il s’agit donc bien d’un manga qui se veut historique mais largement romancé puisque les informations de l’époque ne sont pas nombreuses. On sent toutefois que Chie Inudoh a effectué beaucoup de recherche sur l’Égypte, ses croyances, ses rituels, ses divinités. Tout le manga est parsemé de clins d’œil à divers éléments culturels, d’explications sur les systèmes politiques et d’échanges, ce qui fait qu’on en apprend beaucoup tout en suivant une intrigue intéressante. Un gros plus !

Un plus qui explique peut-être le manque de rayonnement de ce manga, un peu comme Im chez le même éditeur, d’ailleurs. J’en parlais déjà dans un précédent billet où je m’interrogeais sur l’intérêt que les japonais peuvent prêter à la culture égyptienne quand eux-mêmes disposent d’une mythologie très riche. Est ce que l’Égypte fascine davantage l’Occident ? Je n’ai pas la réponse mais comme aucun animé Reine d’Égypte ne semble prévu et qu’on entend assez peu parler de ce manga sur les réseaux, je suppose qu’il va suivre le même triste chemin qu’Im. Pour ce que ça vaut, l’un comme l’autre auront toujours une place spéciale dans mon coeur et je continuerais de les défendre becs et ongles !

La conclusion de l’ombre :
Reine d’Égypte est un manga de qualité qui raconte l’histoire d’une reine égyptienne oubliée, certes de manière romancée mais tout à fait crédible que ce soit au niveau de l’intrigue ou celle de l’historicité. Pour ne rien gâcher, le dessin de Chie Inudoh est superbe que ce soit sur les décors ou les personnages. Malheureusement, on ne parle que trop peu de ce titre, soit à cause de son thème (l’Égypte antique ne fait-elle plus rêver ?) soit parce qu’il est perdu dans la masse. J’espère donc que ce billet vous donnera envie de suivre les traces d’Hatchepsout…

Informations éditoriales :
Reine d’Égypte, écrit et dessiné par Chie Inudoh. Traduction : Fédoua Lamodière. Éditeur : Ki-oon dans sa collection Kizuna. Prix d’un tome : 7.90 euros. Série terminée en 9 volumes.

À l’ombre du Japon #51 : { Kaguya-sama : Love is war ou « Il faut vraiment que j’arrête d’essayer de lire de la romance… » }

8
L’Apprenti Otaku
parle (coucou, ceci est un euphémisme) de cette série depuis plusieurs mois et, à force, j’ai fini par me laisser convaincre de l’essayer. Pourtant, la romance et moi… Vous le savez… Au mieux ça me laisse de marbre et au pire, ça m’énerve très fort. Je ne sais pas trop ce qui m’est passé par la tête au moment où j’ai embarqué ce manga à la librairie, mais bon. Disons que ça fait une expérience !

De quoi ça parle ?
Kaguya Shinomina est vice-présidente des élèves au sein de la prestigieuse académie Shûchiin et également l’héritière d’une famille extrêmement riche. Miyuki Shirogane, lui, n’a pas le même prestige dans son patrimoine mais ça ne l’empêche pas d’être le président des élèves. Tous les deux passent énormément de temps ensemble, si bien que les rumeurs vont bon train. Ils se plaisent, en effet… Hélas ! Leurs egos respectifs les empêchent de se déclarer. Du coup, au bout de six mois, ils en sont toujours au même point…

Un enchainement d’histoires courtes.
Ce premier tome est construit comme une série de situations / sketch qui s’enchainent, un peu comme Otaku Otaku mais au format chapitre un peu plus long. En général je n’ai rien contre mais ici, c’est rapidement redondant. Le postulat de départ affirme que celui qui se déclarera en premier aura perdu et sera un peu le ou la soumis·e du couple, sous-entendant que les sentiments sont finalement une faiblesse. Je ne savais pas trop quoi en penser et je ne le sais toujours pas à l’heure actuelle… Je crois que le principe même me pose déjà un problème et comme je n’ai aucun intérêt pour les choses de l’amour ou du couple, ça n’a rien arrangé.

Pourtant, le dessin est beau et maîtrisé, le fan-service n’est pas obscène et les deux protagonistes sont amusants dans l’enchainement des qui pro quo. Malheureusement, une fois qu’on a saisi le principe, il n’y a plus de surprise et ça ramène ce titre au rang de simple divertissement. Cela n’a rien de mal en soi ! Mais je crois que j’espérais autre chose. La suite devient peut-être meilleure, je l’ignore car je ne compte pas la lire. Je ne suis pas le public cible mais si vous souhaitez d’autres avis je vous recommande de lire celui de l’Apprenti Otaku ou de la Pomme qui rougit.

Une dernière anecdote sur ce titre…
J’ai proposé à une amie de lui offrir le manga car ça correspond davantage à ses goûts qu’aux miens et elle a d’abord été rebutée par cette couverture qui donne le sentiment, selon elle, que le manga est sanglant, malsain, violent. Et du coup, j’ai compris pourquoi moi, j’avais été attirée par le titre au départ, avant de lire le résumé… C’est probablement une façon d’illustrer l’aspect « bataille » entre eux mais c’est vrai que ce n’est pas vraiment l’illustration qu’on attend pour une comédie romantique au lycée !

La conclusion de l’ombre :
Il faut vraiment que j’arrête d’essayer de lire de la romance car hormis pour Otaku Otaku (et encore) ce n’est pas du tout un genre qui m’attire. Je n’apprécie ni ses codes, ni ses intrigues, et même si régulièrement le dessin est très beau, ça ne suffit définitivement pas / plus à justifier un achat. Je dois être intransigeante à l’avenir et accepter que ce genre pourtant si populaire n’est tout simplement pas pour moi.

Informations éditoriales :
Kaguya-sama : Love is War par Aka Akasaka. Éditeur : Pika. Traduction : Marylou Leclerc. Prix par tome : 7,20 euros. Série en cours.

À l’ombre du Japon #50 { Premier contact avec… Bakemonogatari }

Un peu d’histoire…
Le premier tome de cette série date de mai 2019 et j’ai tout de suite été attirée par la couverture. Il faut dire que le dessin de Oh ! Great à qui on doit également la série Air Gear (dont je garde un vague mais bon souvenir) est d’une qualité exceptionnelle. Pourquoi avoir attendu presque trois ans, dans ce cas ? Et bien tout simplement parce que le résumé parlait d’un lycée mordu par un vampire…

Et franchement, j’en ai ma claque des vampires.

J’en suis à un stade de rejet pathologique alors même que j’adorais cette créature et que j’ai du lire presque tout ce qu’on a écrit sur le sujet entre le début de la parution d’Anita Blake et 2017 / 2018. Bon, j’exagère, mais pas loin… Du coup, j’ai reposé le manga et j’ai acheté autre chose.

Puis récemment, j’ai vu la couverture du tome 13 et mon petit cœur a fondu alors même que C’EST CLICHÉ BORDEL. Tout dans la composition de cette couverture l’est mais je ne sais pas, ça a réveillé quelque chose en moi. Ne cherchez pas. Je me suis donc dit que j’avais peut-être jugé un peu vite, que parfois les histoires de vampires, c’est bien… Et en plus j’avais rien à acheter d’autre là tout de suite… Et c’est bien de découvrir de nouvelles choses…

Bref j’ai acheté le tome 1, puis j’ai lu le tome 1, puis… Puis j’ai acheté les tomes 2 et 3. Et j’envisage d’acheter le 4. Pourquoi seulement « envisage » ? On va y revenir.

De quoi ça parle ?
Koyomi Araragi est un lycée qui a été récemment mordu par une vieille vampire sauf que le premier tome ne tourne pas du tout autour de lui et les deux suivants non plus, pas que. Sa sensibilité aux choses surnaturelles lui permet de découvrir le problème d’une camarade de classe, la glaciale Hitagi, dont le poids a été volé par un kami…

Hitagi est un personnage étrange, atypique, froide et violente, qui s’exprime d’une drôle de façon et m’a tout de suite intriguée. Je ne sais pas encore comment me positionner à son sujet toutefois j’ai envie d’en savoir plus. Quant à Koyomi, il m’a un peu rappelé Ichigo en moins sanguin -il a même deux petites sœurs… Il semble disposer d’un cerveau en état de marche, il a des poses stylées et dégage une aura qui me plait bien. Mais…

Ce foutu fan-service.
Il y a du fan-service modèle géant sur les personnages féminins. Dans le premier tome, ça tourne autour d’une adolescente de dix-sept ans (ce qui est habituel dans les mangas quoi que problématique aussi on ne va pas se mentir) mais dans le suivant, on montre la culotte d’une collégienne à plusieurs reprises et on voit Koyomi renifler l’intérieur de sa chaussure, pour une raison qui m’échappe.

D’un côté, il y a une logique à ce fan service puisque Koyomi est un adolescent et que je me rappelle avoir aussi été obsédée par le sexe et les attributs sexuels des personnes autour de moi à cette époque. J’étais intriguée parce qu’il y avait ce tabou autour du sujet, donc forcément… Ça fait partie de l’adolescence et ce serait plutôt malhonnête de ma part que d’affirmer le contraire. Je pense d’ailleurs que c’est le cas de beaucoup de gens et même si je ne suis plus comme ça aujourd’hui, je ne dois pas pour autant me poser en donneuse de leçons.

Bref, les hormones travaillent donc Koyomi, pourtant il ne se comporte pas comme un gros lourd obsessionnel et la narration montre qu’il est davantage intéressé par la personnalité des femmes que leur corps -même si leur corps l’intéresse aussi. Du coup, je n’arrive pas à me positionner vraiment sur la présence de ce fan-service, justement parce qu’il ne définit par le manga. De plus, quand la culotte de la collégienne est dessinée, Koyomi répète à plusieurs reprises qu’il n’est pas un pédophile et ne fantasme pas sur les filles plus jeunes que lui. Le problème c’est de définir pourquoi les auteurs se sentent obligés de sexualiser les femmes, surtout les mineures (en même temps on n’a pas encore croisé de femme adulte dans le manga hormis la vampire qui a mordu Koyomi mais on en sait trop peu sur elle), tout en tenant à côté un discours qui laisse penser qu’ils ne veulent pas les ramener qu’à leur corps…

Cette ambiguïté me perturbe et ça m’agace. J’ai envie de lire le quatrième tome pour voir comment l’histoire évolue et d’un autre côté, je n’ai pas envie de fermer les yeux sur cet aspect fan service, peu importe à quel point le dessin est magnifique et maîtrisé. D’un autre côté, si je veux être parfaitement honnête, les hommes sont aussi exposés d’une manière semblable. L’exorciste est torse nu la plupart du temps et on voit ses abdos bien dessinés, il est clairement sexy à sa manière, un peu style Urahara (décidément les parallèles avec Bleach…). C’est moins le cas pour Koyomi mais il n’en reste pas moins agréable à regarder dans le genre beau gosse ténébreux. Du coup j’ai un peu l’impression que tout le monde est sexualisé, finalement, et que c’est un parti-pris des auteurs. Un parti-pris qui se justifie aussi sur le fait que régulièrement, les histoires de vampire impliquent implicitement une érotisation. Ça pourrait être un argument qui expliquerait peut-être que ça me dérange moins (hormis pour la collégienne).

Et le scénario qui balaie les scrupules…
J’essaie de prendre du recul sur cette question complexe et de vous partager mes réflexions. Vous avez tout à fait le droit de décider que je me trouve des excuses ! Je n’ai aucune réponse à apporter. Toutefois, je tente de poser un regard critique sur cette question, motivée sans doute par la maîtrise scénaristique de NisiOisiN qui n’est probablement pas pour rien dans mon dilemme. Je l’ai dit plus haut, Bakemonogatari ne se réduit pas aux culottes, aux seins et aux abdos bien dessinés. L’histoire qui est racontée dans les trois premiers tomes me parait solide quoi qu’encore à ses débuts, sombre aussi comme j’aime et la psychologie des personnages, qu’ils soient féminins ou masculins, vraiment bien maîtrisées. Il y a une justesse dans le traitement des émotions négatives et dans la noirceur ambiante qui me fait me demander si, finalement, les instants culottes ne sont pas là pour offrir un peu de respiration au lectorat et ne pas le noyer dans les ténèbres.

Est-ce pour autant la meilleure technique ? Non. Pas à mes yeux. Mais je sais que je vais quand même lire au moins le tome 4 pour voir et que si l’histoire continue de m’ensorceler, je vais poursuivre. Sauf si les auteurs tombent dans les considérations pédophiles. J’ose espérer que ça aurait créé un scandale et que j’en aurais entendu parler, si c’était le cas.

Est-ce que je recommande cette série ? Après tout, vous êtes un peu là pour ça je suppose… Et bien oui, si le fan-service n’est pas un problème pour vous. Je réserve évidemment mon jugement final pour plus tard car je débute à peine mais à la lecture des trois premiers tomes, j’ai vraiment envie de voir au-delà.

Petite information ludique pour clôturer ce billet : chaque tome propose une jaquette réversible ! Il y a donc à chaque fois deux illustrations, dont une cachée, et un crayonné sur la couverture en elle-même. J’aime beaucoup.

D’autres avis : pas que je sache mais manifestez-vous !

Informations éditoriales :
Bakemonogatari scénarisé par NisiOisiN, dessiné par Oh ! Great. Éditeur : Pika. Traduction : Yohan Leclerc. Prix par volume : 7,20 euros. Série en cours de publication.

À l’ombre du Japon #49 { Look Back, un manga sur le manga… mais pas que. }

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Je ne sais pas vraiment pourquoi j’ai décidé d’acheter ce manga. Est-ce la chronique de l’Apprenti Otaku ? Est-ce ma libraire qui m’a dit que ouais, c’était bien (notez la puissance de son argumentation :D) ? Est-ce tout simplement le résumé qui a provoqué un écho en moi ? Un peu de tout ça ? Quoi qu’il en soit, j’ai décidé de passer outre ma mauvaise expérience avec Fire Punch pour laisser une chance au mangaka et j’ai bien fait.

Petite remarque personnelle avant d’aller plus loin : je ne comprends pas trop l’intérêt de l’autocollant rond et moche qui clame « par l’auteur de Chainsaw Man » car sauf erreur de ma part, Look Back n’a rien en commun que ce soit au niveau thématique ou de style avec le titre précité. Du coup, cela pourrait induire les acheteurs en erreur (ils s’attendraient à quelque chose de semblable et seraient déçus) ou au contraire, les repousser (ils s’attendraient à un titre d’un tel type alors que pas du tout et passeraient donc à côté). Honnêtement, si je n’avais rien lu sur le manga avant, je ne l’aurais pas acheté rien qu’à cause de ça. Les gens vraiment fans de l’auteur n’auront pas besoin de cette précision pour savoir que c’est la même personne… Le but est peut-être de vendre un maximum en profitant du succès commercial de la série précitée vu qu’il s’agit d’un one-shot toutefois je ne suis pas certaine que ce soit la meilleure démarche pour promouvoir ce titre car il risque d’y avoir une avalanche de retours négatifs de la part des personnes dont ce n’est tout simplement pas le style de manga. Enfin, c’est mon avis.

De quoi ça parle ?
Look Back
c’est tout simplement l’histoire de deux adolescentes qui vont nouer une amitié autour de leur passion pour le dessin. D’un côté, il y a Fujino, une jeune fille qui écrit des mangas en quatre cases dans le journal de son école primaire et que tout le monde dit talentueuse, autant en dessin qu’en sport ou à l’école. De l’autre, il y a Kyômoto, qui suit une scolarité à domicile car elle serait malade. Elle aussi aime dessiner et va aussi publier dans le journal de l’école. Sauf que Kyômoto a un talent fou pour les décors et qu’à côté de ses dessins, ceux de Fujino paraissent tout juste moyens…

Fujino va alors passer par différentes phases : elle va vouloir battre Kyômoto en se donnant à fond pour progresser, puis abandonner quand elle n’y parviendra pas. Si son professeur n’avait pas insisté pour qu’elle aille déposer son diplôme à Kyômoto, l’histoire se serait arrêtée là…

Une amitié artistique.
Ce manga est donc le récit d’une amitié entre deux adolescentes qui vont travailler pour réaliser leur rêve. Et puis… du drame ordinaire qui va tout remettre en perspective.

C’est une histoire qui résonne particulièrement en moi car moi aussi, avant, j’avais une amitié un peu comme celle-là qui s’est terminée (mais pas de façon aussi définitive ni sanglante que la leur, heureusement) et qui m’a beaucoup marqué au point que je ne sois plus capable de me remettre à créer sans elle. Pour cette raison, ce titre a su directement me toucher et il est donc possible que mon avis soit totalement biaisé. D’un autre côté, tout avis est forcément subjectif…

Un manga qui parle de manga.
Look Back travaille finement les émotions des protagonistes et joue avec son support de manga qui parle de manga. Après qu’un malade à la hache ait tué son amie, Fujino réécrit dans son esprit la scène du moment où Kyômoto se fait assassiner par hasard en venant la sauver et en modifiant l’histoire de leur amitié car elle se sent responsable de sa mort. Elle considère en effet que si elles n’étaient pas devenues amies, Kyômoto ne serait pas sortie de chez elle, dans ce monde si dangereux… De plus, au début du manga, l’auteur adapte son style pour dessiner d’un côté comme Fujino, de l’autre comme Kyômoto, en plus de sa propre patte graphique. C’est un peu comme un auteur qui écrit sur un personnage écrivain qui a lui-même un texte dans la diégèse du roman. J’ai beaucoup apprécié le procédé.

D’autant qu’il est maîtrisé et que même si je ne suis pas sensible au type de dessin de Tatsuki Fujimoto, on ne peut pas lui retirer sa maîtrise sur la représentation des émotions. On sent le poids de la douleur, de la culpabilité illogique et pourtant bien réelle. On sent la perte. Pourtant, le dessin reste sobre et c’est là tout le talent de Tatsuki Fujimoto qui parvient à exprimer tellement d’émotions sans tomber dans l’excès sur l’expressivité de ses personnages. C’est presque pudique, à l’image de la façon qu’ont les japonais d’exprimer leur souffrance. Bizarrement, alors que je suis totalement passée à côté de My Broken Mariko que je trouvais terriblement superficiel -je compare car le sujet s’en rapproche un peu avec l’aspect manga en moins, j’ai été très touchée par cette histoire plus que les mots ne me permettent de le dire.

La conclusion de l’ombre :
Je ne peux décemment pas qualifier Look Back de coup de cœur, je vais plutôt parler de coup au cœur en partie à cause de mon histoire personnelle mais également des qualités du mangaka, des qualités que je n’avais pas perçues lors de mon expérience avec Fire Punch. Je suis ravie d’avoir découvert ce titre qui a en plus le bon goût d’être un one-shot !

D’autres avis : L’Apprenti OtakuSonge d’une nuit d’étéLa pomme qui rougit – vous ?

À l’ombre du Japon #41 { Je (re)lis Tokyo Ghoul (arc du prologue + le drame des Fueguchi) }

Ohayô minasan !

J’ai récemment entamé une nouvelle relecture, cette fois consacrée au manga Tokyo Ghoul qui m’avait fait forte impression il y a quelques années lorsque j’ai lu d’une traite les quatorze tomes de la série principale. Je n’hésite d’ailleurs jamais à le citer comme l’un de mes mangas favoris… Mais est-ce toujours le cas à l’heure actuelle ? Comment est-ce que je considère l’œuvre en 2021 ? Et de quoi ça parle, au fait, Tokyo Ghoul ? Autant de questions auxquelles je vais tenter de répondre dans cette nouvelle série d’articles, sur le même format que ma relecture de Black Butler, en évoquant les différents arcs narratifs qui parsèment le manga.

Attention, cet article concerne les tomes 1 à 3 du manga publié chez Glénat. Les extraits visuels appartiennent à Sui Ishida et à Glénat.

De quoi ça parle ?
Ken Kaneki est mortellement blessé un soir et ne doit la vie qu’à la greffe de l’organe d’une goule effectuée par un médecin peu scrupuleux. Dans ce Tokyo alternatif, les goules vivent en parallèle des humains et leur existence est connue. Elles se nourrissent de chair humaine et sont traquées par le CCG. Avec un pied dans les deux mondes, Ken Kaneki va devoir mettre de côté ses préjugés pour apprendre à survivre…

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Premier arc : prologue.
Le prologue couvre les neuf premiers chapitres du manga qui servent à poser les bases de l’univers et des réflexions philosophico-morales qui vont le parcourir. En quelques mots, voici ce qu’il faut savoir : l’histoire se déroule à Tokyo, une capitale nippone divisée en une vingtaine de secteurs dans lesquels les goules se mêlent aux humains. Les goules existent depuis très longtemps, peut-être même depuis toujours ou du moins, c’est ce qu’il semble à première vue mais on dispose de peu d’informations à ce sujet, du moins à ce stade. Dans ce monde moderne, elles sont traquées par les inspecteurs du CCG (Centre de Contrôle des Goules) puisque certaines d’entre elles attaquent des humains pour s’en nourrir.

Une goule ressemble physiquement à un humain hormis sur les points suivants : en théorie, on nait goule, on ne le devient pas. Il s’agit donc d’une espèce à part avec ses propres règles et valeurs. Une goule ne se nourrit que de chair humaine, toute nourriture « normale » a un goût immonde, elle doit donc apprendre à le cacher pour se fondre dans la masse. Une goule est plus forte qu’un humain et plus résistante aussi, si bien qu’elle ne peut être blessée que par une autre goule. Une goule a des yeux rouges qui se manifestent notamment quand elle a faim. Et enfin, une goule possède un kagune, qui prend différentes formes en fonction du type de goule (ailé, blindé, écailleux et à queue). Ce kagune est une arme qui permet à la goule de se battre et de conquérir, par exemple, un territoire. Ou de se défendre.

Là, vous vous demandez peut-être comment s’y prennent les inspecteurs du CCG pour les tuer si on ne peut blesser une goule qu’avec une autre goule ? Et bien en s’emparant du kagune des goules pour le transformer en quinque, ce qui leur permet donc de les affronter et même de les battre. Et ainsi de récupérer de nouveaux kagunes…

Tous ces éléments sont découverts petit à petit par Ken qui, jusqu’ici, était un humain tout à fait normal qui pensait que les goules étaient toutes des prédatrices et donc que les éliminer relevait du bon sens. Recevoir l’un des organes de Lize (une goule qui a essayé de le manger, d’ailleurs) va changer la donne puisqu’il va développer un appétit pour la chair humaine ainsi qu’un kagune, tout en conservant ses valeurs morales. Il refusera pendant longtemps de se nourrir de chair humaine, ce qui apportera évidemment son lot de problème. Ses convictions et certitudes vont être mises à mal par sa rencontre avec des goules qui ne collent pas au stéréotype véhiculé dans les médias. Petit à petit, Ken va se rendre compte que les goules sont comme les humains. Certaines sont « gentilles » et d’autres sont de vraies sociopathes. Ainsi, le manga paraitra manichéen au départ mais les nuances arriveront petit à petit.

Deuxième arc : le drame des Fueguchi
Très tôt dans le manga, Ken va rencontrer Hinami et sa mère, qui sont des goules incapables de chasser. Elles se fournissent donc en viande au café l’Antique qui est un sanctuaire pour goules. De prime abord, Hinami et sa mère paraissent inoffensives et se cachent d’ailleurs des inspecteurs du CCG qui ont tué leur mari / père récemment. Impossible de ne pas compatir à leur histoire. Comme cette révélation intervient très tôt, on comprend vite qu’il existe différents styles de vie chez les goules et que peu importe celui qu’elles adoptent, elles seront quand même tuées à vue sans que les inspecteurs ne cherchent plus loin. Il faut dire qu’ils semblent victimes d’un gros bourrage de crâne…

Cette enquête va permettre au lecteur de changer de point de vue pour pénétrer au sein même du CCG afin d’y rencontrer les inspecteurs Amon et Mado. Le premier vient de sortir de l’Académie et est en binôme avec le second qui le forme sur le terrain. Mado est un personnage assez dérangeant et malsain qui est passionné par les quinques et n’a aucune considération pour la vie des goules. Il suffit de voir comment se déroule son affrontement avec Mme Fueguchi pour s’en convaincre… Amon est comme lui et ne remet rien en question, jusqu’à sa rencontre avec Ken qui va le pousser à s’interroger. La manière dont il se remet en question, lentement, par petites touches, apporte une crédibilité au personnage et un grand intérêt car on sent qu’au contraire de Mado, il y a une place pour une évolution chez Amon que je vois un peu comme le pendant « humain » de Ken Kaneki.

Cet arc se déroule du chapitre 10 au chapitre 29 (plus ou moins) et apporte de premières pistes réflexives sur la nature des goules, sur une cohabitation possible avec les humains (les goules de l’Antique se nourrissent par exemple des corps des personnes suicidées, ce qui ne fait pas de mal) mais aussi sur la notion de vengeance, une décision à laquelle Hinami se retrouvera confrontée. Ce sont des évènements denses et intenses qui s’enchaînent à un rythme maîtrisé, offrant ainsi un page-turner efficace. Notez d’ailleurs que tout ce dont je vous ai parlé jusqu’ici se passe sur seulement trois tomes ! Au quatrième, on change déjà d’arc narratif. Un article complet y sera consacré car il marque, je trouve, un gros tournant au sein du manga.

Ken Kaneki, un protagoniste principal enthousiasmant.
Outre le chara-design sublime et l’écriture soignée en terme non seulement d’intrigue mais aussi de réflexion, un des gros points forts du manga est Ken Kaneki, son protagoniste principal. On le rencontre alors qu’il est étudiant à l’université et se rend au café l’Antique (sans savoir qu’il s’agit d’un repaire de goules…) avec son ami Hide. Là-bas, il craque sur une fille, Lize, parce qu’elle lit un roman de son auteur préféré : Sen Takatsuki. Il s’agit d’un auteur fictif inventé dans la diégèse du manga (et qui aura son importance plus loin dans l’intrigue) mais Ken est, dans l’ensemble, un littéraire dans l’âme si bien que le texte est parsemé de citations et de références diverses à la littérature ou à la philosophie. Je pense que c’est un des points qui m’a le plus enthousiasmé au départ en tant que littéraire. D’autant que lors de ma première découverte du manga, j’étudiais moi-même cette matière…

Ken est un garçon avec des principes mais qui accepte de se remettre en question. Il est même curieux de comprendre, d’évoluer, il cherche donc à échanger avec des personnes dont le point de vue diverge du sien afin de l’intégrer dans sa réflexion. Le monde brutal des goules est à des années lumières de sa personnalité et il n’y aurait probablement pas survécu sans l’aide de Toka ou du patron de l’Antique, mais on reviendra là-dessus car évidemment, l’arc suivant amorce déjà un changement assez radical avec l’arrivée du Gourmet… On en reparlera dans un prochain article.

Et voilà, on arrive au bout de cette première mise en bouche sur le manga Tokyo Ghoul et ma relecture de celui-ci qui est, pour le moment, aussi enthousiasmante que ma première découverte ! N’hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé, on se retrouve bientôt pour un billet sur les arcs suivants.

Mata itsu ka, ja ogenki de !
( À bientôt et prenez soin de vous !)

À l’ombre du Japon #38 { Beast complex, le format court version manga ! }

Ohayo mina !

Nous voici de retour avec un petit article manga qui va un peu traverser les formats puisqu’il commencera par une réflexion inspirée par ma récente expérience du #ProjetOmbre mais aussi par l’édito de la semaine chez l’Apprenti Otaku tout en vous parlant du très bon Beast Complex de l’inégalable Paru Itagaki.

Une question de terminologie…
Pour vous résumer grossièrement en deux mots, l’Apprenti Otaku expliquait que consommer du manga implique souvent un rapport de fidélité de longue durée car beaucoup de séries ont tendance à s’étaler sur au moins une dizaine de tomes. Alors que côté roman, c’est plutôt l’inverse. Il est assez rare (même si ça existe) de trouver des séries aussi étendues. Les raisons sont multiples mais viennent surtout, je pense, du modèle économique classique de notre édition. Du coup, j’ai eu envie de vous inviter à une petite réflexion à ce sujet, comme ça en passant.

Le format court est quelque chose qu’on connait bien en littérature : nouvelles, novelettes, novellas, autant de mots pour désigner des textes de moins de 40 000 mots, en fonction de leur longueur réelle. Le genre connait des hauts et des bas, des éditeurs comme Le Bélial lancent des collections dédiées, pour notre plus grand bonheur… Et de là, la question se pose : est-ce qu’il existe des mangas au format court ? Des mangas « nouvelles » ? Est-il pertinent d’accoler ces deux termes ?

C’est une réflexion un brin étrange, j’en conviens. On peut déjà se demander s’il est pertinent de chercher à appliquer des termes littéraires à un format axé sur le visuel. De plus, si vous lisez du manga, vous savez qu’il existe ce qu’on appelle des one-shot, des titres terminés en un seul tome. Est-ce qu’on peut considérer ces titres comme des nouvelles / novellas ? Ou est-ce qu’ils répondent à d’autres codes qui font que ces termes ne peuvent se transférer d’un format à l’autre ? Je vous le dis tout de suite, je n’ai pas la réponse à ces questions mais n’hésitez pas à me donner votre avis parce que l’échange autour de ce sujet m’intéresse sincèrement.

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Et Beast Complex, dans tout ça ?
Toujours est-il qu’avec Beast Complex, Paru Itagaki s’approche, à mes yeux, du format nouvelle tel qu’on le trouve classiquement en littérature (oui, tout ce blabla pour en arriver là !). La série comptera en tout trois volumes, chacun possédant plusieurs chapitres mais chaque chapitre racontant une histoire achevée sur elle-même, un peu à la manière d’un recueil, finalement. Peut-on dire qu’un chapitre = une nouvelle si ce chapitre raconte une histoire close au format court ? Et pourquoi pas, après tout… Car j’ai vraiment eu, lors de ma lecture, le même sentiment que quand je découvre un recueil au sens classique du terme. Sans parler des nombreuses qualités inhérentes à cette mangaka, dont j’ai déjà pu longuement vous parler dans d’autres articles sur Beastars.

Je sais que le manga divise, que son trait ne plait pas toujours, mais selon moi, cette femme est brillante, fine psychologue, curieuse de tout et a réussi l’exploit de me faire adorer une histoire avec des animaux anthropomorphisés, ce que j’ai en général en horreur. Je me suis longtemps demandée ce qui faisait la différence et elle y a répondu un peu par hasard dans la postface de ce premier volume en expliquant que, petite, elle aimait déjà dessiner les animaux et qu’elle se posait plein de questions concrètes sur les relations qui peuvent les unir en fonction des espèces. Du coup, ses réponses à ces interrogations me paraissent très crédibles et il y a une certaine logique dans la façon dont toutes ces espèces agissent entre elles.

C’est ce qui est raconté dans ce premier volume qui se compose de six chapitres -donc de six histoires closes sur elles-mêmes. La première est intitulée : le lion et la chauve-souris, elle met en scène des adolescents au lycée. Le lion Raul, chef de classe, est envoyé par son professeur pour apporter des notes de cours à un étudiant absent de longue durée, une chauve-souris prénommée Azumo. Sa mission est simple : convaincre l’élève de revenir en cours pour passer son équivalent BAC. Mais vu le drame qui a frappé Azumo, Raul n’est peut-être pas la personne la mieux placée pour réussir !
On découvre ensuite l’histoire du tigre et du castor qui raconte la touchante amitié de deux enfants d’une dizaine d’année qui n’appartiennent donc pas à la même espèce et approchent de l’âge fatidique où les carni’ développent leur envie de manger de la viande. Pourtant, ils sont amis depuis toujours et n’imaginent pas devoir se séparer…
Arrive alors le dromadaire et la louve, où on est cette fois confronté à des adultes. Elle dévoile comment Galom, journaliste sur le point de raccrocher, rencontre Abby, une mystérieuse louve avec qui il passera la nuit, nuit qui changera son destin… On part ensuite dans une ambiance plutôt désenchantée avec le kangourou et la panthère noire qui parle d’un gérant d’hôtel qui accueille une cliente bizarre porteuse d’une valise dont elle refuse de se séparer… Paru Itagaki revient ensuite sur un registre un peu plus léger tout en traitant le cœur de son concept avec le crocodile et la gazelle. Luna travaille depuis cinq ans dans l’émission de cuisine Happy Happy Cooking où elle est commis. Le chef herbi prend sa retraite et est remplacé… Par un crocodile ! De quoi effrayer la pauvre gazelle, surtout que son nouveau binôme enchaîne les remarques tendancieuses au sujet de la viande. Toutefois, il se peut que la personnalité du crocodile lui réserve des surprises… Enfin, ce premier tome se conclut sur la renarde et le caméléon, une belle histoire d’amitié dans un lycée qui évoque le thème du harcèlement et l’importance d’aider ses amis.

Une fois de plus, la mangaka parvient à aborder énormément de sujets en peu de pages et ce, avec efficacité. Dire que c’est sa première série ! Je n’en reviens toujours pas. Parce que oui, j’ai oublié de le préciser mais elle a commencé sa carrière avec Beast Complex qui, séduisant son éditeur, a donné ensuite naissance à Beastars

La conclusion de l’ombre :
Avec Beast Complex, Paru Itagaki propose un titre indispensable pour tous les fans de Beastars mais également parfait pour entrer dans son univers et la découvrir puisque ces histoires courtes n’influent pas du tout sur la trame principale que l’on connait, avec Legoshi, Louis, Haru et compagnie. Fidèle à ses qualités que l’on connait (un trait personnel et plein de caractère, une fine psychologie, une efficacité narrative prouvée), la mangaka aborde de nombreuses thématiques à travers six histoires courtes qui marqueront le/a lecteur/ice. J’ai adoré cette découverte et je me réjouis que la suite paraisse chez nous.

À l’ombre du Japon #37 { Pourquoi Im – Great Priest Imhotep est-il mon shônen préféré ? }

Bonjour à toutes et à tous !

En mai 2019, je publiais sur le blog un article qui présentait les deux premiers volumes de la série Im afin de vous partager mon enthousiasme. Je m’étais dit que j’allais écrire un article plus dense une fois que j’aurais lu les 11 tomes mais je ne l’ai jamais fait… Du coup, comme j’ai décidé qu’en 2021, j’allais me poser pour relire plusieurs sagas phares dans mon cœur, je fais d’une pierre deux coups !

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Im
est la première (et pour le moment la seule, en tout cas à ma connaissance et traduite en français) série de la mangaka Morishita Makoto qui s’est fait remarquée en arrivant deuxième à un concours manga organisé par Square Enix. Elle a travaillé sur Im entre 2015 et 2018 même si elle explique dans la postface du dernier tome qu’elle a dessiné plusieurs premiers jets sur lui à partir de 2013. C’est en visitant une exposition sur l’Égypte Antique qu’elle a eu envie de raconter une histoire sur ce prêtre légendaire et on peut dire qu’elle a été bien inspiré.

Mais de quoi ça parle ?
Hinome est issue d’une famille un peu bizarre qui a mauvaise réputation. Du coup, tout le monde l’évite et la dit maudite. À raison puisque qu’à chaque fois qu’elle tente de prononcer un mot, du feu sort de sa bouche ! Alors qu’elle rentre du lycée, elle tombe sur un drôle de gusse en cavale dans les rues qui s’invite chez elle en déclarant qu’il est le grand prêtre Imhotep, celui de l’Égypte antique, maintenu en sommeil pendant 3 000 ans par les dieux à cause d’un crime terrible qu’il aurait commis… Il a été réveillé pour combattre les magaïs, ces démons issus des Enfers, et il va commencer avec celui qui possède la pauvre Hinome !

Comme je vous ai déjà présenté le manga (voir ici) je ne vais pas revenir sur les concepts de base ou les personnages mais plutôt l’aborder par ses thématiques et surtout la plus importante d’entre elle : l’amitié.

Le shônen & la notion d’amitié.
Dans le genre du shônen, l’amitié est une valeur mise en avant et au centre de tout. Il suffit de regarder les titres les plus vendus dans cette catégorie éditoriale pour s’en assurer. Une amitié profonde lie les membres de Fairy Tail comme l’équipage Mugiwara. C’est son amitié pour Rukia qui pousse Ichigo à se rendre au Seireitei pour la sauver de son exécution tout comme c’est l’amitié que Naruto porte à Sasuke qui est un des grands moteurs de l’intrigue du manga du même nom. Les exemples sont légions et je trouve qu’Im matérialise cela encore mieux puisque c’est l’amitié qui se retrouve au centre de toutes les relations et de toute l’intrigue du manga, du début à la fin. C’est elle qui a poussé Im à devenir un criminel il y a 3 000 ans, c’est elle aussi qui donne à Hinome la force de défendre le grand prêtre quand il le faut, elle encore qui permet aux enfants du corbeau d’avancer et de surpasser leurs traumatismes. L’amitié est mise en scène sous toutes ses formes et l’autrice montre toute la puissance qui peut en émaner tout comme les extrémités auxquelles elle peut pousser.

Deux extraits marquants :
Im1
Dans le premier tome, Hinome explique qu’elle rejette tout le monde pour éviter qu’iels soient blessé.es à cause de ses pouvoirs incontrôlables, ce qui ne l’empêche pas de souffrir d’une profonde solitude. Son rêve est d’ailleurs d’avoir dans sa vie une personne avec qui partager son déjeuner. C’est touchant et on comprend qu’Im se retrouve en elle puisqu’il y a 3 000 ans, le prince Djéser l’a lui aussi sorti de la profonde solitude inhérente à sa fonction de grand juge des enfers.

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C’est ce que montre l’extrait ci-dessus dans l’un des flashbacks qui détaille le fameux crime dont Imhotep est accusé. Cette scène se déroule après qu’Im ait sauvé la vie d’un enfant alors même que les prêtres et la famille royale sont en conflit, si bien que les premiers ne veulent pas aider le peuple dont la famille royale est responsable, afin de rappeler à tous et toutes leur importance. Ouais, c’est pas joli… Toujours est-il que Djéser est un prince un peu particulier, qui trouve que ces petites gué-guerres ne mènent à rien et qui aimeraient changer les choses. Un idéaliste quoi. Quand Im décide de sauver ce garçon, Djéser voit quelque chose en lui qui le pousse à vouloir devenir son ami, avec les conséquences que vous découvrirez en lisant ce manga.

Je suis personnellement bien plus sensible aux questions d’amitié que d’amour. Pour moi, l’amitié est fondamental dans la vie et j’aspire à des relations peut-être trop idéalisée, justement influencée par tous ces shônens avec lesquels j’ai grandi. Je n’ai aucun regret par rapport à cela mais ça explique que ce manga résonne autant en moi et que j’ai toujours les larmes aux yeux en lisant les dernières planches qui comptent parmi les plus belles conclusions d’histoire que j’ai pu lire dans ma vie.

Ma seule grande interrogation c’est : pourquoi Morishita Makoto n’a-t-elle plus publié depuis ? Dans la postface, elle explique qu’elle est reconnaissante d’avoir pu aller au bout de son œuvre même si elle n’a jamais pu faire la couverture du magazine où elle la publiait et qu’elle n’a pas eu le succès escompté. D’ailleurs, elle espérait une adaptation en animé qui, sauf erreur de ma part, n’a jamais eu lieu et c’est un très grand mystère pour moi quand je vois ce qu’on peut adapter… À mes yeux, Im est clairement un manga qui mériterait un plus grand rayonnement et qui fait partie de ces œuvres injustement délaissées alors que tout y est très bon, du chara-design au découpage de l’action, avec un rythme d’intrigue constant et bien mené, une galerie de personnages plutôt variée et tous.tes doté.es d’une vraie personnalité… Qu’est-ce qu’il vous faut de plus ?

Brève réflexion sur l’interculturalité entre l’Égypte et le Japon
Je me souviens de m’être dit que j’avais vu beaucoup de mangas sur le thème de l’Égypte antique et ça m’avait intrigué. Je l’ai même écrit il n’y a pas si longtemps dans une autre chronique manga. Pourtant, en effectuant quelques recherches, les seuls mangas vraiment basés sur cette période sont Reine d’Égypte et Im, tous les deux chez Ki-oon et tous les deux excellents dans leur genre. On notera aussi Cléopâtre chez Nobi-Nobi mais je ne l’ai pas lu donc je ne me permets pas d’en parler. Je pense que mon erreur vient du fait que les deux titres sont arrivés sur le marché du manga plus ou moins en même temps et que je les ai connu à quelques mois d’intervalle mais aussi que, d’une manière plus générale, j’ai grandi en étant baignée dans la mythologie égyptienne avec des œuvres comme Papyrus ou encore les films de la Momie. À l’instar du Japon, la mythologie égyptienne est polythéiste et très riche, elle déborde de mythes, de légendes, de dieux avec des figures semblables (y’a des serpents partout ! #Apophisme4ever) et c’est peut-être la raison pour laquelle il n’y a pas davantage de mangas inspirés par cette culture ? Les japonais ne la trouve probablement pas aussi originale et inspirante que nous, européen.nes ? Si vous avez des idées ou des théories à ce sujet, n’hésitez pas à les partager.

(Édit 20/06/2021: On me rappelle dans les commentaires qu’il y a également le manga Yu Gi Oh qui est très inspiré de l’Égypte antique, comment ai-je pu l’oublier ?! J’ai énormément regardé l’animé et lu les deux ou trois premiers tomes du manga. Le fameux « c’est l’heure du dudududu-el restera à jamais dans les mémoires… Merci Nana Coubo pour avoir réparé cet oubli.)

Quoi qu’il en soit, j’espère que ma petite présentation vous aura donné envie de jeter un œil à ce manga si cher à mon cœur et surtout, que ce sera pour vous une belle découverte !