Sorcière des ombres – Pascaline Nolot

Sorcière des ombres est le nouveau roman fantastique / ado de l’autrice française Pascaline Nolot. Publié chez Gulf Stream dans sa collection Échos, le titre est prévu pour le 9 février… 2023 ! Il était en énorme avant première à Montreuil et j’en ai profité pour me le procurer puisque j’apprécie en général les textes de l’autrice ainsi que l’autrice elle-même. L’avant première est telle que le livre n’est actuellement pas sur le site de l’éditeur, c’est vous dire… Quant à la couverture, on la trouve uniquement en mauvaise qualité à droite à gauche, je vous demande donc de m’excuser pour cela. Je reste un peu perplexe sur l’intérêt marketing d’une telle manœuvre mais ce n’est pas le sujet.

De quoi ça parle ?
Cassiopée est une adolescente de quatorze ans qui souffre de sa timidité. Pour la « soigner », ses parents décident de l’inscrire de force en stage de théâtre durant l’été, loin de chez elle, ce qui l’obligera à vivre chez son cousin. Une fois sur place, à Agonie, Cassiopée rejoint la troupe du théâtre du Serpent Vert et découvre l’existence d’une pièce maudite, la Sorcière du Rével, que ses compagnons de troupe ont très envie de monter…

Une héroïne timide.
J’ai beau réfléchir, je ne me rappelle pas avoir déjà lu un roman où le thème de la timidité est traité avec autant de justesse ou même traité tout court. Le plus souvent, on dit aux gens timides de « faire des efforts » ou on balance tout un tas de conseils type pensée positive du genre « quand on veut on peut ». Même quand on a conscience des difficultés rencontrées par les personnes timides, on a parfois du mal à comprendre réellement ce que recouvre la timidité, on adresse des remarques qui se veulent encourageantes mais n’aident en fait pas du tout. La lecture de ce roman m’a fait prendre conscience d’énormément de choses par rapport à ma propre attitude dans ces cas-là et ce qu’elle peut faire ressentir à autrui. Je dirais donc que la mission première du livre est accomplie et qu’il me semble très important de le faire lire au plus grand nombre de gens (surtout d’adolescents) possible.

Sans doute parce que l’autrice est elle-même une personne timide, la voix de Cassiopée sonne juste et m’a plus d’une fois poussée à m’interroger sur les situations vécues par la jeune adolescente. J’ai régulièrement été révoltée que ce soit par la façon dont les parents se positionnent sur le sujet, le discours qu’ils lui tiennent, la façon dont son professeur la rabaisse en se croyant intelligent ou même l’attitude de Lucile, l’ancienne meilleure amie de l’héroïne qui la rejette parce que sa timidité devient trop difficile à gérer pour elle. Je les ai tous trouvés très injustes envers la pauvre Cassiopée et vraiment peu compréhensifs, pourtant… Pourtant ces personnes ne pensent pas à mal. Elles essaient d’aider Cassiopée, elles ont peur pour elle, pour son avenir, parce que sa timidité dite maladive lui cause un véritable handicap social. L’enfer est pavé de bonnes intentions, me direz-vous… Et toute la mise en place du roman ne fait que le prouver.

La pression sociale autour de l’importance de bien s’exprimer est superbement mise en scène dans tous ses aspects et surtout, dans toute sa complexité. Le sujet est bien traité du début à la fin. J’avais un peu peur de la conclusion toutefois il ne s’agit pas de « guérir » cette timidité mais de l’accepter et d’apprendre à vivre avec comme d’autres traits de personnalité, une démarche que je trouve vraiment bonne. Il y a aussi une réflexion sur l’image de soi, sur l’image que la société nous fait développer de nous-même et sur la façon dont les gens peuvent se comporter comme des cons envers toute personne un peu en dehors de la norme.

C’est un roman que je trouve important rien que pour le traitement de ce thème mais ses qualités ne s’arrêtent pas ici. 

Cassiopée est une héroïne intéressante à suivre. J’ai parfois été lassée par ses introspections que je trouvais trop longues (à mon goût) et qui nuisaient (à mon goût, encore) au rythme du récit mais ça ne m’a pas empêché de ressentir beaucoup d’empathie pour elle, d’avoir envie de me mettre à sa place, à celle des autres aussi pour comprendre, réfléchir… C’était très intéressant comme expérience. De plus, la relation qu’elle développe d’abord avec la petite Zoé (qui m’a rappelé par certains aspects la fille de l’autrice, du moins ce qu’elle partage à son sujet sur Facebook, notamment ses réflexions amusantes et sa drôle de maturité) puis avec son cousin Clarence, un adolescent excentrique qui aime porter des redingotes et s’exprimer d’une façon soutenue, un peu comme s’il était le personnage d’une pièce. Je me suis beaucoup retrouvée en lui parce que j’ai eu une passe de ce genre aussi et ça m’a rappelé de chouettes souvenirs. Les dynamiques fonctionnent très bien et la cohérence du personnage est de mise jusqu’à la fin. Cassiopée est une adolescente qui a une personnalité très riche mais dissimulée derrière sa timidité. Elle-même a une piètre image de sa personne alors que ses actes spontanés nous montrent sa vraie valeur. Sans surprise, Pascaline Nolot parvient à se montrer subtile et percutante à la fois. 

Du théâtre et de la musique…
Ce n’est pas un secret : j’adore le théâtre, c’est un art qui me passionne et même si je ne monte plus sur scène pour diverses raisons, je l’ai fait pendant longtemps. Du coup, je suis ravie quand des auteur·ices que j’aime évoquent ce thème dans leurs livres. L’idée du stage m’a rappelé de bons souvenirs, les exercices proposés par le professeur sont amusants et donnent envie de les pratiquer en même temps que les protagonistes. Tout tourne autour d’une pièce dont on a droit à quelques extraits seulement alors que j’espérais la découvrir en entier dans des interchapitres. Cette pièce est maudite car lorsqu’elle a été jouée il y a trente ans, quelqu’un est mort et le traumatisme est resté chez les habitants d’Agonie. Ainsi, quand la troupe annonce qu’ils vont la rejouer, certains esprits s’emballent en prétendant que la sorcière du Rével va revenir et de fait, des évènements mystérieux, effrayants et même parfois violents se déroulent à mesure qu’avance cet été 2019. 

Des évènements dont l’explication se révèlera pour le moins… originale, tirant le roman dans une forme de fantasy pour brouiller la frontière des genres. J’ai été assez surprise par cette tournure, sans réussir à définir si j’ai apprécié ou non le twist car il semble sorti de nulle part et pourtant, une fois à la fin, j’ai été surprise de constater que tout s’emboîte parfaitement. Il reste pas mal de questions sans réponse concernant le Rével, ce qui donnera peut-être lieu à un autre roman dans cet univers, qui sait ? 

En plus du théâtre, la musique tient une part importante dans La sorcière des ombres car Cassiopée est fan d’un groupe de musique appelé GIRL (pour Ghost In Real Life) si bien que plusieurs extraits de paroles parcourent tout le texte, des paroles percutantes qui illustrent bien l’importance que peut avoir la musique dans la vie d’une personne. C’est également un élément qui m’a fait me sentir proche de Cassiopée. 

La conclusion de l’ombre
Sorcière des ombres est un thriller fantastique à destination d’un public adolescent plutôt efficace dans l’ensemble. Le roman met en scène une héroïne très timide et traite du sujet avec beaucoup de justesse, ce qui ne surprendra personne ayant déjà croisé la route de Pascaline Nolot. Cassiopée devra dépasser ses difficultés pour participer au stage de théâtre mais surtout, découvrir ce qui se cache derrière la malédiction de la pièce La Sorcière du Rével. Si le texte souffre à mon goût de quelques longueurs dues aux introspections de Cassiopée qui prend souvent le lecteur par la main pour tout expliciter (ce qui est cohérent vu le public cible) je l’ai trouvé important pour les thématiques abordées, intéressant dans ses idées et bien mené dans l’ensemble. Un roman fort recommandable !

D’autres avis : sûrement en février 2023…

Les autres romans de Pascaline Nolot sur le blog : Les orphelins du sommeilles larmes de l’araignéeRouge.

Informations éditoriales :
La sorcière des ombres par Pascaline Nolot. Éditeur : Gulfstream dans sa collection Échos. Couverture par Jessica Heran. Prix au format papier : 18,90 euros. 

L’imparfé #1 le royaume qui perdait ses couleurs – Johan Heliot

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Le royaume qui perdait ses couleurs
est le premier tome d’une saga fantasy jeunesse intitulée l’imparfé et écrite par l’auteur français Johan Heliot. Publié chez Gulfstream, vous trouverez ce roman au prix de 13.90 euros.
Je remercie l’éditeur d’avoir offert cet epub dans le cadre du #PLIB2020 !

De quoi ça parle ?
Tindal a treize ans et va pouvoir partir à la capitale afin de suivre son entrainement de guerrier. Hélas ! Une erreur administrative le contraint à rejoindre à la place l’école des fées pour apprendre la magie. C’est le début d’un grand bouleversement…

Un parfum d’égalité entre les genres.
Il me semble très important, surtout au sein d’un roman jeunesse, d’aborder des thématiques sociales fortes qui permettront au lectorat cible de réfléchir sur certains sujets et de se construire en tant qu’individu. Le génie de Johan Heliot a été de reprendre les codes assez communs à la fantasy (surtout la fantasy jeunesse) et d’y évoque l’émancipation, pas juste féminine d’ailleurs puisqu’elle concerne autant les filles que les garçons. Pourquoi une fille n’aurait-elle pas le droit de devenir guerrière ? Et pourquoi un garçon ne peut-il pas devenir une fée ?

Au début du roman, le personnage de Tindal, treize ans, est mortifié d’apprendre qu’il va devoir suivre des cours à l’école des fées. Il a toujours rêvé de devenir un guerrier légendaire, à l’instar de ses idoles dont les portraits ornent les murs de sa chambre. Pourtant, à mesure que le récit avance, Tindal se rend compte que ce n’est pas lui qui veut fondamentalement devenir un guerrier -en plus il n’en a ni la carrure ni le caractère- mais bien la société à travers l’influence de son propre père. C’est « comme ça » que doit être un garçon afin d’honorer à sa famille. Sauf qu’en discutant avec une fée, Tindal comprend que ce n’est peut-être pas tout à fait vrai, qu’on l’influence. Que veut-il, lui ? Le génie de l’auteur tient ici qu’il n’impose pas une façon de considérer les choses de la part des adultes mais laisse le jeune héros mener son propre cheminement réflexif, l’air de rien, au milieu de toute une action qui s’enchaîne sans temps morts.

Du coup, au départ du livre et de l’intrigue, les personnages et l’univers paraissent très manichéen, ancrés dans une société sexiste avec des réflexions qui hérisseront le poil de certain(e)s. Si je n’avais pas été prévenue grâce à la chronique de Miss Chatterton, j’aurais probablement été de ceux-là et peut-être même laissé le roman de côté. Ç’aurait été très dommage vu le bon divertissement qu’il m’a offert.

Un univers simple mais efficace.
Dans le monde typé médiéval inventé par Johan Heliot, les enfants âgés de treize ans doivent tous partir à la capitale afin de suivre un certain entrainement. Pour les garçons, c’est l’école militaire au terme de laquelle les meilleurs pourront intégrer l’armée. Pour les filles, c’est l’école des fées au terme de laquelle, idem, les meilleures pourront devenir des apprenties et apprendre à maîtriser la magie des couleurs.

Parce que oui, dans ce monde, la magie passe à travers les couleurs qu’elle aspire pour créer des sorts divers et variés, en fonction des affinités de chacune. La menace qui pèse sur le royaume est justement celle du Sombre, un personnage énigmatique qui rend tout gris, la nature comme les gens, créant des « grisâtres » sorte de zombies animés qu’il contrôle et qui composent son armée. Son but semble tenir à la simple destruction, pour le plaisir de dominer. Visiblement il n’a pas pensé à l’après mais bon, les grands méchants y songent rarement !

Des inspirations flagrantes
Outre l’angle intéressant visant à aborder le droit de chacun à être qui / ce qu’il ou elle veut ainsi qu’une forme d’égalité des chances, ce premier tome de l’Imparfé reste assez classique avec des inspirations flagrantes. J’ai régulièrement effectué des parallèles avec des histoires devenues des schémas dans l’imaginaire tel que Harry Potter ou même Star Wars (surtout Star Wars en fait notamment autour de l’histoire familiale). C’est parfait pour le public novice à qui est destiné ce roman mais les révélations ainsi que les retournements de situation paraitront un peu gros / déjà-vu pour un lecteur plus aguerri qui a déjà consommé beaucoup de pop culture.

Une lecture fraiche et sans prise de tête.
Cela n’empêche pas ce texte d’être agréable à découvrir même si on se doute du dénouement, que les éléments s’enchaînent par moment un peu vite et avec une facilité qui pêche souvent quand on est confronté à un roman destiné à un public plus jeune. Je l’ai lu en prenant une certaine distance, j’avais juste envie de me vider la tête et l’Imparfé a parfaitement rempli son rôle à ce niveau.

La conclusion de l’ombre :
Le premier tome de l’Imparfé pose les bases d’une saga sympathique à destination d’un public en fin d’enfance / début d’adolescence. Très bonne porte d’entrée en fantasy pour les plus jeunes, le roman paraîtra sans surprise à un public plus aguerri en matière de SFFF et de pop culture. Ce qui ne l’empêche pas de constituer un divertissement très agréable et parfaitement recommandable.

D’autres avis : Les tribulations de Miss ChattertonLes lectures de Sophie – vous ?

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Les découvertes de l’ombre #15

Bonjour à tous !
Déjà deux mois depuis le dernier épisode des découvertes de l’ombre ! Deviendrais-je plus difficile à tenter ? Heureusement, certains blogpotes ne perdent pas la main… Découvrons tout de suite la sélection de cette fois-ci avec les résultats en fin d’article.

En quelques mots, je vous rappelle le concept: Au quotidien, je suis beaucoup de chroniqueurs (vive l’application WordPress !) qui me font découvrir des livres intéressants. Ces livres, je me les note toujours sur le bloc-note de mon téléphone (merci à toi qui remplace le post-it que je perdais tout le temps). Puis je me suis dit… Bon sang que tu es égoïste ! Fais donc partager tes découvertes au monde entier, mets en danger les comptes en banque et les PàL qui menacent déjà de s’écrouler !

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Blog : Les tribulations de Miss Chatterton
Johan Heliot est un auteur dont j’apprécie souvent le travail. Pourtant, je ne m’étais pas penchée sur cette saga, rebutée par son qualificatif jeunesse -ce qui est un peu bête je le conçois vu qu’il m’arrive d’en lire et même de passer un bon moment. Miss Chatterton s’est empressée de me démontrer à quel point j’avais tort dans sa chronique ! J’ai été attirée par l’aspect conte de fées non-genré et par la thématique du passage à l’âge adulte ainsi que l’absence de violence. Utiliser la tête au lieu des muscles? Ça change !

2
Blog : Les Chroniques du Chroniqueur
Je n’ai lu qu’un roman de Catherine Dufour jusqu’ici et j’en suis ressortie sans trop savoir si j’aimais ou non. J’en entends énormément de bien sur la blogosphère via les chroniques sur ses nouvelles et sur la Danse des lutins chez l’Atalante (il faudrait que je le lise aussi d’ailleurs !). C’est donc naturellement que j’ai jeté un œil sur celle du Goût de l’immortalité. Bien m’en a pris ! J’apprécie grandement l’originalité d’une narration sous forme de lettre écrite dans le futur et par une immortelle qui plus est. Les thématiques brassées semblent nombreuses et actuelles (épidémies, destruction des écosystèmes, fracture sociale, etc.) je me réjouis donc de lire cela par moi-même.

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Blog : My Dear Ema
Le young adult et moi entretenons une relation compliquée, vous le savez si vous suivez régulièrement le blog. Je suis sévère, je lui passe peu de choses mais quand une blogueuse aussi exigeante qu’Ema qualifie ce livre de pépite en allant jusqu’à comparer son world-building à Harry Potter (et elle est aussi potterhead que moi !) well… Je me demande pourquoi ce roman n’est pas déjà dans ma PàL.

4
Blog : l’ours inculte
C’est en lisant sa chronique du tome 3 que j’ai ajouté ce roman à ma liste sans tarder. Depuis plusieurs années je reste frileuse face aux parutions de Bragelonne malgré quelques bonnes surprises (coucou Wyld, Victor). Toutefois, l’ours parle ici d’un univers grimdark, d’une ambiance sombre, de désespoir (de désespoooooaaaaar même) et j’a-dore. Du coup, hop, c’est dans la liste.

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Blog : Chut, maman lit !
J’aime le Japon, ce pays me fascine surtout pour son Histoire et sa culture. Pourtant, j’ai du mal à trouver des romans contemporains qui me bottent vraiment et ici, même s’il s’agit de SF, le titre s’ancre tout de même dans la société japonaise (enfin si Anne-Laure ne ment pas :D). De plus, le principe est intriguant : un bazar qui offre une réponse à tous les soucis qu’on lui présente ! Pour ne rien gâcher, il s’agit d’un coup de cœur pour notre maman liseuse. Il était donc obligatoire que ce titre rejoigne ma PàL.

Et voilà c’est déjà terminé pour cette fois ! Nous sommes donc à une tentation pour miss Chatterton et Chut maman lit ainsi que Célinedanae, FungiLumini, les livres de roses, l’Apprenti Otaku, Lutin et songes d’une walkyrie. Nous arrivons à deux tentations pour Ma Lecturothèque, l’ours inculte, ainsi que les Chroniques du Chroniqueur et My Dear Ema. Le Grand Serpent maintient son avance avec quatre tentations, qui osera lui disputer son titre ?

Et vous, vous avez découvert quelque chose d’intéressant récemment? 🙂

Rouge – Pascaline Nolot

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Rouge
est un one-shot fantastique écrit par l’autrice française Pascaline Nolot. Publié par Gulfstream dans sa collection Électrogène, vous trouverez ce roman partout en librairie au prix de 17 euros.

Je remercie FungiLumini du blog Livraisons Littéraires pour m’avoir prêté ce roman. Allez lire sa chronique, elle m’a mis l’eau à la bouche ! Ce roman a été repoussé suite à la crise du COVID-19, il devait à l’origine sortir en avril. N’hésitez pas à lui faire un bon accueil et à vous montrer curieux pour qu’il ne tombe pas dans l’oubli 🙂

De quoi ça parle?
Dans une époque moyenâgeuse indéterminée, Rouge vit dans le petit village maudit de Malombre. Pour être exacte, elle y survit, rejetée et malmenée par les autres habitants pour sa face défigurée et son ascendance prétendument maléfique. Si Rouge n’a pas péri au berceau, c’est parce qu’elle est une fille et que la Grand-Mère réclame toutes celles du village qui commencent à saigner. Qu’arrive-t-il à ces Bannies? Rouge va le découvrir car son tour arrive…

Une réécriture sombre de conte.. mais pas que.
Ce qui saute aux yeux en premier lieu quand on entame la lecture de ce roman, c’est sa parenté avec l’histoire du Petit Chaperon Rouge notamment au niveau des figures représentées : le Chasseur (on pense d’abord à Blanche Neige d’ailleurs mais j’ai vérifié, il y en a un aussi dans une réécriture plus tardive du Petit Chaperon Rouge), les loups, la Grand-Mère, le village qui s’oppose à la forêt. Pourtant, ce sont bien là les seuls points communs tant Pascaline Nolot se réapproprie l’histoire avec brio au point de modifier en profondeur les rôles de chaque protagoniste. Je ne peux m’étendre davantage sur le sujet sans divulgâcher le contenu du roman toutefois en dehors des noms, finalement… L’histoire d’origine n’a plus grand chose en commun avec celles de Perrault ou des frères Grimm bien qu’on retrouve l’idée d’une marche en forêt tendant vers un but : aller voir la Grand-Mère en lui apportant un panier avec des victuailles. Comme quoi, avec un concept vu et revu depuis des siècles (littéralement !) on peut toujours innover.

L’originalité et la réappropriation de ce conte connu par l’autrice est un des éléments que j’ai le plus aimé parce qu’il permet de sortir le lecteur de ses certitudes. Il ne s’agit pas bêtement de moderniser une histoire vue et revue avec des thématiques modernes, non ! Pascaline Nolot joue avec nous en nous empêchant de nous fier à ce qu’on croit connaître. J’adore !

Rouge : une héroïne attachante.
Le personnage de Rouge est la seconde grande force de ce roman. La jeune fille survit à Malombre et subit des traitements assez horribles de la part des villageois. Sa mère lui a donné naissance alors qu’elle sombrait dans la folie, une folie induite par le démon avec qui elle aurait forniqué, toute entière obsédée par son désir de maternité (enfin, c’est ce qu’on dit au village). Selon les Malombreux, cela explique sa face rouge. Ils la pensent même contagieuse : si on la touche, on risque d’attraper son mal. Depuis la vieille nourrice qui l’a prise en charge jusqu’à ses quatre ans (et est décédée ensuite, la faute à Rouge ?), Rouge n’a plus eu le moindre contact humain. Personne n’a de considération pour elle à l’exception du Père François qui essaie de tempérer un peu les ardeurs de ses ouailles en délimitant les périodes où ils ont le droit d’être agressifs avec Rouge et de Liénor, son meilleur ami qui manque un peu de courage pour la défendre sans pour autant cesser de la fréquenter.

Rouge possède une psychologie soignée, nuancée, la rendant ainsi très crédible dans son rôle de victime harcelée sans pour autant tomber dans le larmoyant lourd. La jeune fille garde la tête haute, encaisse, souffre mais ne s’apitoie jamais. Un bel exemple ! J’ai vraiment adoré la suivre jusqu’au bout de son histoire.

Entre passé et présent, une narration alternée.
L’autrice opte pour une narration en alternance entre le présent de Rouge et les différents éléments de son passé, notamment ce qui concerne sa mère. Ainsi, le lecteur apprend petit à petit de quelle manière Rouge a véritablement été conçue, comment sa mère a pu accoucher, comment les villageois ont interagis avec elle, etc. L’idée est bonne mais j’ai souvent trouvé ces passages redondants à mesure que j’avançais puisque les informations revenaient souvent. Parfois pour révéler un mensonge mais la majorité du temps, non. En se plongeant dans la psyché d’autres protagonistes, Pascaline Nolot se répète un peu trop sur les éléments de son histoire et c’est le seul vrai point noir de ce roman selon moi. Heureusement, il a bien d’autres qualités ! Notamment la plume de l’autrice qui se plie à l’ambiance ancienne de Malombre avec des tournures de phrase qui offrent une belle musicalité au texte.

Un drame ordinaire pour des thématiques modernes.
Pascaline Nolot met en scène un drame ordinaire (vous comprendrez en lisant) qui prend des proportions gigantesques à cause de l’avidité / stupidité (choisissez votre mot favori) humaine. Elle traite ainsi plusieurs thématiques hélas trop actuelles : le harcèlement, le culte des apparences, le fanatisme religieux mais aussi le sexisme ordinaire dans tout ce qu’il a de plus répugnant. Pour exemple (ceci est un divulgâchage donc surlignez pour lire 😉 ) je pense surtout au Père François qui excuse son comportement obscène en affirmant que le Diable a pris possession de son corps et que grâce à sa foi, il a réussi à ne pas devenir fou au contraire de la pauvre femme dont il abuse, viol qui donnera finalement naissance à Rouge. Les chapitres de son point de vue sont admirablement maîtrisés et provoquent un choc rehaussé d’indignation à mesure qu’on avance.

La conclusion de l’ombre :
Pascaline Nolot signe ici la réécriture d’un conte sombre et dérangeant qui met en avant des thématiques tristement actuelles telles que le harcèlement, le culte des apparences mais aussi la femme en tant qu’être-objet. L’autrice se réapproprie des archétypes connus en y apportant une véritable originalité. Si on peut déplorer quelques longueurs sur les parties du roman consacrées au passé de l’héroïne, cela n’empêche pas de dévorer ce page-turner en quelques heures à peine. Un texte tout à fait recommandable qui n’épargnera pas les sentiments du lecteur.

D’autres avis : FungiLumini, les Dream-Dream d’une bouquineuse, l’ourse bibliophile.

BML #23 – mai 2020

Bonjour à tous !
Ce premier jour de juin sonne l’heure du bilan sur le blog. Mai a été un mois un peu compliqué, assez long et pourtant je n’ai pas lu énormément. On aurait pu penser le contraire avec la réouverture des librairies et la reprise des sorties littéraires… Voyons un peu de quoi il en retourne précisément.

Côté romans :

Trop semblable à l’éclair – Ada Palmer (Le Bélial – ♥)
Nixi Turner contre les croquemitaines #4 – Fabien Clavel (Chat Noir)
Tu es belle Apolline – Marianne Stern (Chat Noir)
Le Prieuré de l’oranger – Samantha Shannon (De Saxus)
Rive Gauche – Pierre Bordage (L’Atalante – SP)
Rouge – Pascaline Nolot (Gulfstream – chronique à venir)

Six romans lus donc ce qui est beaucoup moins que d’habitude ! J’ai pris mon temps et je me suis consacrée à des pavés sans me mettre la pression en profitant justement de lire chez moi pour ne pas avoir à transporter ces romans dans mon sac. J’ai excellemment bien commencé le mois avec une découverte extraordinaire, un énorme coup de cœur : Ada Palmer ! On en reparlera à l’occasion puisque j’ai la suite dans ma PàL et qu’elle n’y restera pas longtemps :3

Côté mangas :

Black Butler #12 -> #14
La malédiction de Loki #4
Noragami #5 -> #11
Otaku Otaku #2 & #3
Reine d’Égypte #7
Twittering bird never fly #6
Chobits #1

J’avais envie de lire du manga d’autant que ma librairie a rouvert, ce qui m’a permis de continuer de très bonnes séries comme Noragami ou Otaku Otaku ! J’ai aussi pu lire Reine d’Égypte en nouveauté et tant mieux parce que ça me manquait o/ Au contraire de Twittering Bird qui m’a laissé un sentiment mitigé puisque je ne me rappelais de rien ou presque vu le laps de temps entre les sorties et l’absence de résumé au début du tome. Dommage… Je ne suis pas certaine de poursuivre du coup. Quant à Chobits, je connaissais l’animé et je suis ravie de me lancer dans le manga version papier qui apporte une toute autre ambiance. On reparlera de ce titre dans le prochain « à l’ombre du Japon ». Je pense aussi consacrer un article à Noragami de manière plus large pour expliquer ce qui me plait dans ce manga.
Cela me fait un total de 16 tomes lus.

Petit bonheur du mois :
Les petits bonheurs du mois est un rendez-vous initié par le blog Aux Petits Bonheurs qui consiste à mettre en avant les moments positifs de la vie. Outre le 3e anniversaire du blog j’ai surtout envie de retenir la réouverture de Kazabulles. Je me suis rendue compte durant le confinement à quel point me rendre jusqu’à ma librairie préférée me manquait. Mes libraires sont devenus des amis au fil du temps et ne plus pouvoir me poser au comptoir pendant une heure pour discuter de tout et de rien m’a pesé. Je suis contente que ce soit (pour le moment) derrière nous ! Je m’y suis déjà rendue à deux reprises et je me tempère en m’imposant maximum une fois par semaine, histoire de ne pas encombrer inutilement ni les rues ni la librairie.

Et voilà le bilan est déjà terminé 🙂
Et vous, ça raconte quoi?