Morgane Pendragon – Jean-Laurent Del Socorro

J’ai un problème majeur quand je lis de la fantasy d’inspiration arthurienne : je pense toujours à Kaamelott. C’est l’oeuvre de fiction qui m’a initiée au genre à l’origine et elle a pris le dessus sur le canon plus ancien des textes médiévaux auxquels je trouve de toute façon moins de charme. Du coup, je lis assez peu de romans du genre parce que je ne parviens pas à détacher les personnages de leurs équivalents dans l’oeuvre d’Astier ce qui entraine une dangereuse perte de crédibilité pour certain·es.

Mais il s’agit du nouveau roman d’un auteur français dont j’apprécie grandement le travail et qui ne m’a jamais déçue (sauf sur une nouvelle que je trouvais assez peu aboutie mais pas mauvaise en soi). Souffrant d’une grande difficulté à trouver des romans qui me stimulent depuis ce début d’année 2023, je me suis tournée vers cette valeur sûre en me disant que si quelqu’un méritait que je tente l’expérience malgré mes difficultés, c’était bien Jean-Laurent ! Et je ne regrette pas du tout.

De quoi ça parle ?
Et si Morgane avait retiré l’épée d’Uther au lieu d’Arthur ? C’est le postulat sur lequel se base l’auteur pour réécrire le mythe arthurien dans une version d’une grande modernité sur le plan inclusif. Un roman qui s’inscrit magistralement dans son époque.

Une narration maladroite.
Je vais commencer par évoquer le point qui m’a déplu pour ensuite me concentrer sur le positif : la narration. L’auteur choisit d’alterner un chapitre du point de vue de Morgane avec un chapitre du point de vue d’Arthur, ce qui est intéressant car s’ils sont ensemble au même endroit au début, vers le milieu du roman la géographie (et d’autres choses) vont les séparer, ce qui permet d’avoir une vision plus globale de ce qui se passe dans le royaume de Logres. Le souci c’est que cette double narration est écrite chaque fois à la première personne et la personnalité des personnages ne l’imprègne pas suffisamment, si bien qu’il est parfois difficile d’identifier qui parle. Heureusement, chaque en-tête de chapitre pour le prénom de son narrateur mais les parties de Morgane me semblent plus maladroites, moins justes dans les émotions hormis dans la dernière partie. Je pense que l’idée de doubler la narration est bonne mais qu’il aurait fallu opter pour la troisième personne, ce qui aurait été moins problématique. Ou alors se concentrer uniquement sur Morgane mais ç’aurait été dommage car les tourments d’Arthur sont très intéressants et ont su me toucher à leur façon.

Mais plein de bonnes idées !
Honnêtement, ce point ne gâche pas l’intérêt du roman qui se lit très bien malgré tout grâce à des chapitres courts et dynamiques. L’auteur n’hésite pas à laisser le temps s’écouler pour se concentrer sur les évènements majeurs et brille toujours autant dans la description des batailles et des arts militaires. C’est quelque chose auquel je suis particulièrement sensible, presque autant que l’aspect psychologique des personnages et j’ai été servie pour les deux.

Cet aspect n’est pas amoindri par la maladresse de la narration, hormis peut-être chez Morgane mais ça ne l’en rend pas absent pour la cause. Arthur et elle sont amants, amoureux, mais le royaume de Logres exige des sacrifices de la part de sa reine qui ne pourra pas épouser son partenaire selon son cœur. Arthur, de son côté, rêve d’une couronne pour n’hériter que du duché de ses parents, ce qui le rend un peu amer. Son amour pour Morgane se dispute avec son ego et avec la certitude de Merlin qu’il a l’étoffe d’un grand roi. À tout ceci va se mêler des conflits de foi avec la jeune religion chrétienne qui gagne de plus en plus d’ampleur, la faërie qui décide justement de se réveiller avec l’avènement de cette nouvelle reine, des bonnes volontés qui ne suffisent pas toujours… C’est passionnant.

Outre ces deux protagonistes, on retrouve divers personnages tirés des légendes arthuriennes qui sont réécris, parfois jusqu’à changer de genre. L’aspect inclusif du texte est bien amené et de manière assez naturelle d’ailleurs : les femmes sont chevalières et cela ne pose de problème à personne. Morgane, disciple de la Déesse, peut se marier avec une femme si elle le souhaite et les relations homosexuelles ne font lever aucun sourcil hormis celui des chrétiens. J’ai retrouvé ici un peu de John Scalzi et d’Ellen Kushner qui optent pour une normalisation militante et c’est ce qui me parle le plus car c’est à mes yeux la manière la plus efficace de lutter contre les discriminations : décrire un monde où elles n’existent tout simplement pas, où elles ne sont pas un sujet, où chacun·e fait ce qu’iel veut dans son intimité.

En plus de tous ces éléments, Jean-Laurent Del Socorro n’oublie pas l’exploitation du merveilleux très présent dans les légendes arthuriennes tout comme dans ce roman. On croise bien des créatures au fil des pages qui auront leur rôle à jouer et l’auteur décrit ce moment charnière où ce sera aux hommes de décider s’ils rejettent ou non la magie. On vit en quelque sorte la fin d’une ère et ça ne me laisse jamais indifférente.

La conclusion de l’ombre :
Morgane Pendragon est un roman riche, surprenant et rondement mené comme sait si bien le faire Jean-Laurent Del Socorro. J’ai retrouvé tout ce que j’aime chez lui : cette rigueur historique, cette fine exploitation des légendes, des personnages féminins nombreux, construits et passionnants, un certain sens du rythme et de la mise en scène, des réflexions intéressantes sur la place de la religion et du merveilleux, pour ne citer que cela… Morgane Pendragon est une réussite de plus à ajouter au palmarès de l’auteur. J’ai tourné la dernière page avec émotion, la gorge serrée, j’ai vibré avec ces protagonistes et à aucun moment je n’ai eu envie de laisser ma lecture de côté. Avez vous besoin d’autres raisons pour vous précipiter sur ce titre ?

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D’autres textes de l’auteur sur le blog : BoudiccaRoyaume de vent et de colèresGabin sans « aime » et le vert est éternelLa guerre des trois roisDu roi je serai l’assassinJe suis fille de ragela machine différenteUne pour toutes – …

Informations éditoriales :
Morgane Pendragon écrit par Jean-Laurent Del Socorro. Éditeur : Albin Michel Imaginaire. Couverture : Didier Graffet. Prix au format papier : 22,9 euros.

À l’ombre du sapin : quels livres offrir en 2022 ?

C’est une tradition propre à la blogosphère de proposer chaque année une liste de livres à mettre sous le sapin. Je m’y plie pour ma part depuis 2019 avec assiduité et c’est aussi l’occasion de revenir sur mes meilleures lectures de l’année même si celle-ci n’est pas totalement terminée. Je précise que dans cette livre, vous ne trouverez pas uniquement des livres publiés durant l’année 2022. Certains sont antérieurs mais je les ai lus durant cette période. Je voulais, comme l’année dernière, me restreindre à un seul titre par format mais je ne parvenais pas à me décider entre plusieurs livres et comme finalement ils n’étaient pas si nombreux que cela à avoir su m’intéresser, j’ai mis tout ce qui m’avait enthousiasmé cette année.

Mon beau sapin de l’imaginaire francophone :

Cinq titres à vous recommander et il y en a pour tous les goûts ! Envie de SF militaire surprenante au world-building de folie ? Opexx est un bon choix, comme souvent dans la collection UHL. Envie d’un roman post-apo dépaysant par sa construction narrative et sa réinterprétation (au sens propre) de nos mythes (fondateurs) ? L’évangile selon Myriam est un indispensable. Des envies de voyage en terre nippone et surtout, dans le monde spirituel aux côtés d’une galerie de personnages attachants ? L’Héritage de l’esprit-roi plaira à tous les publics. Parés pour une folle aventure dans la mer chimique à bord du Player Killer aux côtés de son excentrique capitaine Jonathan ? Envie d’un roman qui s’assume jusqu’au bout dans son propos et sa noirceur teintée d’humour ? Les flibustiers de la mer chimique saura vous séduire. Et enfin, envie d’un texte à la fois romancé et historique, qui mélange la prose au théâtre en racontant la folle histoire (vraie !) de Julie Maupin hantée par nul autre que Méphistophélès ? D’un texte résolument féministe écrit par l’un des plus grands auteurs français du moment ? Cédez à la tentation en offrant Une pour toutes.

Mon beau sapin des traductions :

Quatre titres ont particulièrement retenu mon attention cette année à commencer par l’extraordinaire Axiomatique de Greg Egan qui est une leçon de maîtrise du genre hard sf accessible et invite à la réflexion sur notre société au sens large, présent comme avenir. Brillant. Dans le genre court et chez le même éditeur, on retrouve aussi la trilogie de la Maison des Jeux dont le dernier tome est prévu pour janvier, coup de cœur sur le fond comme sur la forme avec une histoire plus profonde qu’on pourrait le croire, un style musical et maîtrisé. J’attends la fin avec une impatience mâtinée d’angoisse car terminer une série n’est jamais simple… Toujours dans le format court mais cette fois chez l’Atalante, ambiance positivité et cocooning avec Un psaume pour les recyclés sauvages qui propose une belle réflexion sur la culture, la tolérance et notre rapport à l’autre. Enfin, last but not least, un roman que j’attendais depuis longtemps et qui a ravi mon goût pour le genre de cape et d’épée : Le privilège de l’épée de la grande Ellen Kushner, résolument engagé sur un plan féministe avec des personnages marquants et une bonne dose d’intrigue rythmée. Délicieux !

Mon beau sapin graphique…

J’ai lu beaucoup de mangas cette année mais peu ont vraiment marqué mon esprit à l’exception bien entendu de Beastars qui a vu sa conclusion paraître cette année en français. 22 volumes. Ça peut paraître énorme mais aucun n’est à jeter, Paru Itagaki fait montre d’une surprenante maîtrise narrative pour son premier manga qui est une critique sociale d’une rare finesse. J’ai adoré. Je n’ai pas encore écrit sur la saga de manière globale mais je compte la relire en 2023 comme je l’avais fait pour Black Butler et proposer une analyse poussée des arcs narratifs. Autre manga dont la présence sous le sapin de l’ombre ne surprendra personne : Iruma à l’école des démons qui serait probablement le plus merveilleux cadeau à offrir à quelqu’un que vous aimez puisque c’est parfait pour tous les publics, c’est drôle, bien scénarisé, bien dessiné, intelligent et vraiment fort sur un plan émotionnel. Gloire à l’Apprenti Otaku pour me l’avoir fait connaître.

Côté BD, j’ai lu pas mal de bonnes choses mais je conseillerais en premier lieu mon absolu coup de cœur pour les Indes fourbes qui m’a été offert par mon libraire pour mon anniversaire. J’ai adoré me faire balader par le narrateur et me plonger dans les dessins sublimes de Guarnido (dont je recommande aussi Blacksad au passage). Le principe de base est très inspiré, c’est du superbe travail.

L’étoile en haut du sapin :

Vous pensiez vraiment que je pouvais rédiger une liste de recommandation sans parler de Terra Ignota ? La série est désormais complète avec ses cinq volumes qui changeront, je l’espère, votre vie de lecteur·ice comme ce fut le cas pour moi. C’est un cadeau parfait pour une personne avec l’envie de s’investir dans une saga exigeante mais d’une richesse inégalée sur bien des plans. Un monument de la littérature. Lisez Ada Palmer.

D’autres listes chez les blogpotes : Au pays des cave trollsYuyineL’épaule d’OrionMondes de poche – vous ?
Mes anciennes listes : 2021 – 2020 (romansgraphiques) – 2019.

Je vous souhaite à tous·tes de joyeuses fêtes, puissiez vous recevoir plein d’excellents livres ♥

Les abandons de l’Ombre : Summerland, Unity et Ymir.

Voilà un moment que j’hésitais à lancer ce format d’article, surtout que les abandons s’enchaînent cette année. Je n’ai pas toujours envie d’évoquer tous les textes que j’abandonne et ce pour diverses raisons mais les cas présentés ici sont particuliers. Déjà, il s’agit de service presse alors si on prend le temps de me les envoyer -sous divers formats- je peux bien prendre le temps d’écrire un mot à leur sujet. Surtout quand, objectivement, ce sont de bons livres dont le seul tord est de ne pas correspondre à mes goûts de lecture.

Je me propose donc d’aborder chaque texte séparément puis de tirer un constat général. Après chaque court retour, je vous référencerais d’autres chroniques qui offre un regard différent du mien sur ces romans, afin de vous permettre d’accéder à davantage d’avis.


L’histoire se déroule en 1938 au sein d’une uchronie où le point de divergence se situe après la Première Guerre Mondiale, notamment dans les vainqueurs qui redessinent le paysage politique. On a d’un côté la Grande-Bretagne et de l’autre la Russie qui, comme de juste, continuent de se méfier l’un de l’autre. Ce n’est pas la seule chose qui a changé car côté anglais, on a découvert Summerland à savoir l’endroit où on se rend après la mort. Il est donc possible désormais de discuter avec des gens décédés et toute la société s’est construite autour d’un système de ticket à avoir au moment de son décès pour ne pas se perdre. Le concept est très pointu et intéressant. Hélas, passé la découverte initiale, ça devient vite ennuyeux à mon goût.

C’est la chronique d’Apophis qui avait attiré mon attention sur ce roman et donné envie d’essayer, ce qui est assez paradoxal puisque les éléments qui m’ont finalement poussé à abandonner ont tous été détaillés dans son retour très complet. Ce qui, pour lui, étaient des qualités ont, pour moi, été source d’ennui ce qui rappelle aussi qu’il peut être intéressant et même important de parler d’une lecture décevante puisque cela pourrait donner envie à d’autres personnes de lire le livre en question. Ce qui nous déplait peut séduire d’autres lecteurs et vice versa.

Histoire d’être un peu plus claire : je suis intellectuellement capable de reconnaître la qualité de l’univers qui a été construit ainsi que son ambition mais je ne suis pas parvenue à m’intéresser aux personnages qui ont plus une fonction qu’une âme, ce qui est un gros handicap pour moi qui ne peut pas me contenter d’une bonne idée, surtout pas sur un format long. De plus, l’intrigue type espionnage dans les années 30 n’est pas ce que je préfère, même au sein d’une uchronie, sans que je puisse vraiment donner une raison recevable à ça autre que : les goûts et les couleurs. La mise en scène du sexisme propre à l’époque sert à le dénoncer mais ça ne suffit pas pour relever mon intérêt.

Il paraît que le livre s’épanouit dans son dernier tiers sauf que je suis assez lassée de devoir me taper deux tiers d’un livre ennuyeux pour enfin arriver à quelque chose d’excitant. Ce n’est pas le type de construction narrative qui me convient, j’ai donc décidé de ne pas poursuivre la découverte.

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Unity est un roman cyber-punk / thriller / post-apo / sûrement d’autres genres que j’oublie. L’humanité vit en partie sous l’océan, dans des cités bulles qui sont sous le contrôle d’une puissance totalitaire. Pourquoi vivre sous l’eau ? Parce que sur la terre, c’est bien foireux et il ne reste pas grand chose hormis du désert -ce qui n’empêche pas les gens d’essayer d’y survivre. Dans ce contexte, on rencontre Danaë, une femme pas comme les autres qui s’avère rapidement être plus qu’une humaine : elle porte en elle une sorte de conscience collective dont on ne savait pas grand chose au moment où j’ai arrêté ma lecture.

Encore un roman repéré chez Apophis (décidément on n’est plus sur la même longueur d’onde en ce moment) que j’ai reçu un peu par hasard en demandant les sorties de la rentrée littéraire chez AMI (j’entendais par là Marguerite Imbert et Émilie Querbalec). Comme il a été envoyé avec les autres fichiers, j’y ai quand même jeté un œil et ce qui m’a perdue ici, c’est l’absence de contexte clair. Il y a bien trop d’informations, données trop vites et trop mélangées. J’ai eu le sentiment que l’autrice avait une check-list de thèmes et de concepts qu’elle voulait absolument aborder et qu’elle avait peur d’en oublier si elle ne s’y mettait pas directement. On se retrouve balancé au milieu de l’intrigue sans avoir les bases de l’univers ce qui implique un vocabulaire spécifique qui ne renvoie à rien pour la lectrice novice en SF que je suis, ce que j’ai un temps mis de côté pour essayer de me plonger dans l’intrigue sauf que celle-ci prend la forme d’une sorte de course poursuite. Quelqu’un veut tuer le personnage principal, qui elle veut s’enfuir d’une cité sous-marine pour ne pas mourir, c’est un trope qui m’ennuie au plus haut point parce que c’est rare de croiser un·e auteur·ice qui maîtrise la tension narrative.

Pour ne rien arranger, je n’ai pas accroché au personnage de Danaë, je trouvais Alexeï plus intéressant mais cela n’a pas suffit pour me donner envie de continuer à tourner les pages. Enfin, l’ambiance « régime totalitaire et complot global » me hérisse depuis quelques mois, je ne le gère plus bien du tout. Sans doute l’écho avec notre réalité, notre quotidien. J’ai envie d’un autre genre de lecture.

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Yorick est un mercenaire qui a quitté Ymir, sa planète natale, bien des années plus tôt en jurant de ne plus jamais y remettre les pieds. Le problème, c’est que son employeur se moque pas mal de ses états d’âme et le détourne durant sa stase pour l’envoyer chasser le grendel -un genre de monstre cybernétique. À cette traque va se mêler des échos du passé de Yorick et notamment le retour de son frère, qui lui a arraché la mâchoire bien des années plus tôt.

J’ai déjà parlé plus d’une fois de Rich Larson sur le blog, que ce soit pour l’excellent recueil La fabrique des lendemains ou pour ses nouvelles parues dans le Bifrost. De mémoire, je n’avais pas encore été déçue par l’auteur et il fallait bien que ça arrive un jour. C’est juste dommage que ce soit avec son premier roman…

J’ai décidé d’arrêter ma lecture à la moitié pour plusieurs choses : déjà, à nouveau, l’ambiance. On est sur une planète inhospitalière, on évolue dans des bas-fonds crasseux, il y a une méga entreprise hyper totalitaire, c’est très sombre, oppressant, ça ne correspond pas du tout à ce que j’ai envie / besoin de lire pour le moment.

Pourtant, j’ai persévéré parce que je connaissais déjà le travail de l’auteur et que j’avais confiance. Je me disais qu’il méritait bien que je m’accroche un peu, que je lui laisse le bénéfice du doute. Hélas, j’ai rapidement eu l’impression que l’histoire racontée aurait pu aisément tenir dans une novella et que le roman souffrait de longueurs, de digressions, sans parler des flashbacks nébuleux mélangés à des trips de drogue qui n’aident pas à s’accrocher malgré la brièveté de ses chapitres parfois longs de deux ou trois pages seulement. Ce dernier point a été relevé comme négatif par d’autres mais c’est quelque chose que j’ai apprécié et qui m’a d’ailleurs poussé à aller aussi loin dans ma lecture.

Autre élément en faveur du roman : le personnage de Yorick et la mise en scène de ses pulsions autodestructrices. C’est quelque chose qui m’accroche bien en général sauf qu’ici, ça manquait d’âme par moment, de sentiments, de densité, comme si l’auteur n’arrivait pas bien à jongler entre son univers, son intrigue et son protagoniste au point de me perdre en route car mon intérêt pour Yorick n’a pas suffit à éclipser mon malaise face à l’univers. Même s’il a des qualités indéniables, ce ne sont pas celles qui m’attirent dans un roman, encore moins en ce moment. Je tournais les pages sans réelle envie d’en savoir plus, ce qui a conduit à mon abandon un peu après la moitié du livre.

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Quelles conclusions en tirer ?
Depuis quelques mois, il semble évident que je ne suis plus du tout attirée par les romans étouffants, crasseux, qui mettent en scène des régimes tyranniques et la misère humaine. Peut-être (sans doute) que ça a un rapport avec l’actualité, peut-être que mes goûts évoluent simplement, mais je recherche tout autre chose dans mes lectures. Le souci, c’est que je ne sais pas quoi précisément donc je navigue en aveugle, au petit bonheur la chance.

Je suis aussi de plus en plus attirée par le format court. Ces romans ne sont pourtant pas très épais, ils font entre 350 et 450 pages ce qui est dans la norme et même dans la norme basse mais j’ai remarqué que j’éprouvais davantage d’indulgence envers une nouvelle ou une novella qui m’ennuie qu’un roman. J’ai besoin d’un certain type de construction narrative pour m’accrocher sur le long terme et surtout, de m’intéresser aux personnages. J’ai besoin qu’ils aient une âme, pas juste qu’ils servent une intrigue ou jouent les pantins dans un monde-super-bien-construit-pour-nous-en-mettre-plein-la-vue.

Je ne suis pourtant pas mécontente d’avoir essayé de les lire car même si j’ai abandonné en cours de route, l’expérience m’a appris des choses sur moi-même et permis d’affiner davantage mes critères de sélection d’un livre. Une chance que ça ait chaque fois été avec des services presses numériques (à l’exception d’Ymir qui, avec l’accord du Bélial, sera offert à la bibliothèque de mon village afin d’en faire profiter le plus grand nombre), si bien que ça n’a rien coûté à personne hormis un mail et un peu de temps.

Et vous, est-ce que vous avez abandonné un livre récemment ?

Les Flibustiers de la mer chimique – Marguerite Imbert

Tout qui me connait un peu sait qu’en d’autres circonstances, je n’aurais pas posé un regard sur ce roman parce que je ne suis pas une grande adepte du post-apo (quoi qu’on m’annonce du pirate enfin son équivalent, j’avoue que je suis un peu faible avec ça moi…). Il ne faut jamais dire jamais, d’autres ouvrages ont gagné au fil du temps leur statut d’exception mais je n’y peux rien, ce genre littéraire me déplait. Je le trouve souvent inutilement violent, défaitiste et malheureusement, de plus en plus raccord avec la réalité. Si j’ai arrêté de regarder les infos de 19h, c’est pas pour me les infliger quand j’essaie de m’évader par la lecture…

Bref, des exceptions, il y en a et le roman de Marguerite Imbert en est une belle. Qu’on se comprenne bien : c’est du post-apo. C’est sombre. Sans concession. Mais y’a pas que ça. C’est aussi complètement barjot, drôle, déjanté. L’autrice assume pleinement toutes les facettes de son livre et il en a de nombreuses.

De quoi ça parle ?
Les Flibustiers de la mer chimique propose une narration alternée à la première personne entre Ismaël et Alba. Le premier est fait prisonnier par les Flibustiers après un « accident », ce qui nous permet de découvrir l’équipage du sous-marin PK (pour Player Killer) ainsi que son… excentrique… dirons-nous… capitaine Jonathan. La seconde est une Graffeuse, une personne barrée (pour rester polie) qui dispose de vastes connaissances sur l’ancien monde que son clan se transmettait de génération en génération. Elle est emmenée à Rome pour servir la Métareine.

Il s’agit donc bien d’un roman postapocalyptique qui se déroule plusieurs dizaines d’années après une catastrophe qui a décimé une grosse partie de l’humanité. Laquelle ? On le découvre au fil du livre. À quoi ça ressemble ? Et bien les océans sont toxiques, les chiens sauvages ont pris le contrôle des terres pendant que des monstres marins se baladent dans la mer, on a un continent de plastique, des clans divers et variés qui prônent tous leur petite idéologie, des tentatives pour survivre plus ou moins heureuses… L’univers est assez riche, bien pensé, immersif et crédible. C’est dans ce décor qu’on se lance à la rencontre de nos protagonistes.

Des personnages… excentriques.
Les Flibustiers de la mer chimique roman sans concession pour l’humain et pour l’Humanité au sens large. L’autrice brosse le portrait de multiples personnages (le plus marquant restera pour moi Jonathan) pour lesquels on se prend d’affection avant d’encaisser une trahison quand on découvre leur partie sombre, dégueulasse, lâche parfois. Et on se sent coupable de continuer à les apprécier, on se sent presque sale de se chercher des excuses pour le justifier. Marguerite Imbert est cruelle avec son lectorat qu’elle met face à ses contradictions, face à sa propre lâcheté, face à ses justifications foireuses. J’apprécie de me faire ainsi malmener, d’être heurtée dans mes convictions et surtout, de suivre les mésaventures de personnages que personne (encore moins l’autrice) ne cherche à excuser. Iels sont plus d’une fois horribles, immondes, comme n’importe qui peut l’être mais ce n’est pas si courant qu’on le montre en littérature, même en littérature de l’imaginaire. Rien que pour ce terrible pragmatisme, les Flibustiers de la mer chimique est un texte à découvrir. Mais il a encore d’autres choses à offrir…

Un texte riche et intelligent.
C’est en effet un roman d’une rare intelligence non seulement par ses multiples références à la pop culture comme à l’Histoire mais aussi par sa manière de questionner notre rapport au passé et à la mémoire. À l’instar du brillant Évangile selon Myriam de Ketty Stewart, Marguerite Imbert utilise le personnage d’Alba pour réécrire partiellement (notre) Histoire, la truffant parfois de quelques erreurs, imprécisions ou tout simplement d’éléments issus de nos propres fictions pour montrer à quel point le savoir, pourtant érigé comme important, fondamental, peut être aisément faussé et relatif. Le sous-texte est aussi inspiré et sans concession que les protagonistes. J’adore ! Évidemment, l’engagement écologique saute aux yeux et est rappelé par l’intrigue plus d’une fois mais je ne peux trop m’appesantir dessus sans risquer de divulgâcher certaines surprises -ce qui serait au mieux criminel de ma part.

Enfin, pour ne rien gâcher, l’humour et les tirades mémorables sont au rendez-vous, provoquant volontiers plus d’un sourire au fil de la lecture. Pourquoi l’apocalypse devrait être quelque chose de triste ? De déprimant ? De résolument sombre ? Désenchanté ? On peut très bien réfléchir sur ce terrible « après » d’une manière crédible sans pour autant s’infliger de l’ultra-violence et des excès de tous les côtés. L’équilibre trouvé par l’autrice a su me convaincre et m’emporter au fil des pages. Pour ne rien gâcher, la fin ouverte me fait rêver, elle laisse entrevoir la possibilité d’autres aventures pendant la fin du monde mais quoi que choisisse de faire l’autrice avec son excellent matériel, je tiens déjà à la remercier pour ce grand moment de lecture.

La conclusion de l’ombre :
« Je ne crois pas que l’apocalypse soit nécessairement une chose triste. » C’est ainsi que commence les Flibustiers de la mer chimique et on peut dire que la mise en bouche tient toutes ses promesses. Dans une narration à la première personne alternée entre deux narrateurs, le lecteur suit une galerie de personnages barrés, désespérément humains, avec leurs excès et leurs faiblesses dépeints d’une bien habile et savoureuse manière. Le texte, riche de réflexions sur la crise écologique, la mémoire historique et la postérité, nous rappelle qu’un roman engagé n’est pas forcément lourd ni désespéré et que même s’il ne reste plus d’espoir, ce n’est pas une raison pour se laisser abattre. Je suis plus que convaincue par la première incursion de Marguerite Imbert dans les genres de l’imaginaire et je vais suivre avec attention la suite de sa carrière.

Je remercie Gilles Dumay et les éditions Albin Michel Imaginaire pour ce service presse numérique.

D’autres avis : L’Épaule d’Orion (gloire à lui qui, le premier, a attiré mon attention sur ce roman) – Au pays des cave trollsLe nocher des livresGromovarBoudiccaLe dragon galactiqueLes blablas de TachanFeygirlSometimes a book – vous ?

Informations éditoriales :
Les Flibustiers de la mer chimique par Marguerite Imbert. Éditeur : Albin Michel Imaginaire. Illustration de couverture : Sparth. Prix au format papier : 22,9 euros.

Émissaires des morts (le roman) – Adam-Troy Castro

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Émissaires des morts
est composé de quatre nouvelles + un roman de science-fiction par l’auteur américain Adam-Troy Castro. Première sortie de 2021 chez Albin Michel Imaginaire, vous trouverez ce titre partout en librairie au prix de 26.90 euros.
Je remercie AMI & Gilles Dumay pour ce service presse.

Cette chronique concerne le roman intitulé Émissaires des morts. Je vous ai parlé des quatre nouvelles qui précèdent ce texte, incluses dans le même ouvrage publié chez Albin Michel Imaginaire, dans un article antérieur. Pour rappel et en quelques mots, j’avais été très emballée par la qualité de ces histoires courtes qui permettent un premier contact efficace avec le personnage d’Andrea Cort, sa situation et l’univers dans lequel elle évolue. J’ajoute que ces quatre nouvelles apportent une vraie plus-value au roman en lui-même bien que l’auteur l’ait écrit pour en permettre la lecture même pour celles et ceux qui n’ont pas pu ou voulu lire les nouvelles.

Voyons à présent ce que donne le roman…

De quoi ça parle ?
Andrea Cort est envoyée sur Un Un Un, une planète où les IAs sources ont créé une nouvelle espèce, ce qui pose des problèmes diplomatiques graves car on soupçonne une forme d’esclavage de leur part. Pour une fois, ce n’est pas pour ce souci qu’on envoie Andréa mais bien parce qu’un meurtre a été commis au sein de la délégation diplomatique humaine et que tout semble accuser les IAs sources… Ce qui risque de créer un gigantesque drame social si les relations diplomatiques sont rompues avec elles vu l’importance qu’elles ont pris au sein des sociétés humaines dans le domaine, par exemple, des soins de santé. Ses supérieurs font donc comprendre à Andréa qu’il serait très commode de dénicher un autre coupable, s’il s’avère que les IAs sources sont bien impliquées.

Qui est Andrea Cort ?
Petit rappel au sujet de ce personnage qui ne me semble pas inutile si vous n’avez pas lu mon précédent billet.

Andrea Cort est une avocate qui travaille pour le Corps Diplomatique de la Confédération homsap, ensemble reprenant tout un tas de planètes et de gouvernements aussi divers que variés. Elle n’a pas vraiment le choix puisque, dans son enfance, elle a participé à une forme de génocide et ce métier lui permet de ne pas être extradée sur des mondes qui souhaitent la condamner. Vive l’immunité diplomatique ! Elle a toutefois été emprisonnée / étudiée jusqu’à sa majorité et cela a forcément laissé des traces. À ce stade, je dois préciser que ce génocide commis sur la planète Bocaï va être davantage développé au sein du roman et va concrétiser les implications développées dans la nouvelle Démons invisibles dont je vous ai parlé dans mon autre billet. C’est donc un élément sur lequel on va revenir dans une série de flashback glaçants.

Andrea Cort est une femme complexe qui a en horreur les planètes et n’aime pas beaucoup l’espèce humaine, ou n’importe quelle autre espèce en réalité. Solitaire, froide, cynique, elle pourrait aisément devenir un cliché sans la manière dont l’auteur la met en scène, n’hésitant pas à montrer ses failles, ses traumatismes, ses faiblesses aussi. Andrea Cort est un échantillon d’humanité dans tout ce que ce terme a de paradoxal : elle se hait pour les actes commis par le passé, a souvent des pulsions suicidaires qu’elle ne concrétise pas, et sait qu’au fond d’elle, elle appartient à la classe des monstres qu’elle chasse pourtant. Pourquoi un monstre ? Parce qu’elle a adoré tuer, elle s’en rappelle, et n’hésite pas à recommencer si la situation l’exige.

Les nouvelles permettaient de la voir en action et d’apprécier son professionnalisme ainsi que l’absence de liens sociaux autour du personnage. Je trouvais cela assez rafraichissant et original. Dans le roman, cet aspect va évoluer au fur et à mesure que l’intrigue avance, notamment grâce au couple d’inseps, les Porrinyard. J’avoue ne pas savoir comment me positionner face à leur relation et à la manière dont les révélations finales permettent au personnage d’Andrea de changer, de se rendre compte qu’elle a vécu pendant des années sous le poids d’un postulat de départ erroné. Ça m’effraie un peu pour la suite car une grande partie de ce que j’appréciais dans ce personnage risque de disparaître. Toutefois, l’auteur a su démontrer jusqu’ici sa capacité à me surprendre agréablement donc j’ose espérer qu’il ne va pas tout gâcher dans la suite.

J’en profite pour préciser que le roman est écrit à la première personne, tout comme l’une des nouvelles. Cela renforce le degré d’intimité entre le lecteur et Andrea, empêchant ainsi de plus facilement jouer sur son aspect froid et détaché. À nouveau, c’est un choix de l’auteur, on adhère ou pas, c’est selon la sensibilité de chacun mais je me dois de préciser que j’ai apprécié la maitrise d’Adam-Troy Castro de la narration à la première personne.

Une enquête somme toute classique mais efficace.
Émissaires des morts est un récit d’enquête qui respecte les codes du genre policier avant d’être un ouvrage de SF (ce qui se traduit plutôt dans l’univers et les questionnements finaux). On voit clairement les différentes étapes et ressors du scénario : Andrea est mise sur une affaire sans qu’on lui demande son avis, elle arrive dans un milieu inconnu dont elle apprend les règles, elle interroge différents témoins et représentants de l’autorité sur place, accumule des éléments et des preuves dans son dossier, suspecte certains plus que d’autres mais en fait non c’est pas lui / elle alors que bon sang tout le / la désigne quand même, doit affronter quelques péripéties car quelqu’un veut manifestement l’empêcher de résoudre cette affaire, etc. Il n’y a pas de surprise sur le déroulement en tant que tel mais on ne s’ennuie pourtant pas durant cette lecture grâce à l’écriture efficace de l’auteur et au personnage d’Andrea, qui reste à mes yeux la grande force du roman. Enfin, ça, c’est vrai jusqu’à la toute fin…

Une fin qui tire en longueur.
C’est le seul gros point noir du texte. Les quarante (et même soixante) dernières pages auraient pu être vraiment raccourcies car il y a beaucoup de redite et d’insistance sur des points déjà bien assez clairs. Un échange avec l’éditeur a pointé le fait que ce pouvait être un hommage au genre policier, une sorte de clin d’œil à ce qu’a pu faire Agatha Christie, notamment avec Poirot. Après coup, je me dis que c’est peut-être bien cela que cherchait Adam-Troy Castro mais ça n’en reste pas moins longuet, même aux yeux de la lectrice de Christie que je suis. À mon sens, l’auteur a un peu trop pris son lecteur par la main ici ce qui pourrait être un point positif pour celles et ceux qui manquent d’attention ou qui aiment qu’on écrive les éléments noir sur blanc. Ça n’a jamais été mon cas donc j’ai un peu regretté le manque de dynamisme final ainsi que la discussion entre Andrea et les inseps. Si je devais juger sur base de ce que j’ai pu lire jusqu’à présent, je pense que l’auteur brille particulièrement sur le format court et que ce roman aurait pu être une novella bien plus efficace si cette intrigue avait été rédigée sous ce format.

Attention, qu’on se comprenne bien : j’ai trouvé les explications trop longues mais leur portée n’est en aucun cas dénuée d’intérêt. Au contraire, ça permet de lier le propos de Démons invisibles avec le roman tout en ajoutant de nouveaux enjeux et en permettant au texte de prendre un autre tournant. Il s’agit, après tout (surlignez pour dévoiler la révélation) de discuter du désir de mourir d’une espèce entière et de juger le comportement de ceux qui, en son sein, souhaitent justement continuer à exister. Et ça promet pour la suite.

La conclusion de l’ombre :
Émissaires des morts est le premier roman où on retrouve le personnage d’Andrea Cort après avoir passé quatre nouvelles en sa compagnie. Cette dernière va devoir mener une enquête pour meurtre sur la planète Un Un Un, crime où tout accuse les IA sources que ses supérieurs cherchent justement à innocenter. Si le format enquête est très classique, l’intérêt du texte réside à la fois dans les implications philosophiques du dénouement final et dans son personnage principal. Je me réjouis de découvrir la suite qui sort justement cette année (en juin si tout se passe bien) chez Albin Michel Imaginaire !

D’autres avis : Le culte d’ApophisAu pays des cave trollsL’épaule d’OrionJust a wordOutrelivresYozoneYuyineAlbedoLes lectures du MakiLe chien critiqueUn papillon dans la lune – vous ?

Émissaires des morts (les nouvelles) – Adam-Troy Castro

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Émissaires des morts est composé de quatre nouvelles + un roman de science-fiction écrits par l’auteur américain Adam-Troy Castro. Première sortie de 2021 chez Albin Michel Imaginaire, vous trouverez ce titre partout en librairie au prix de 26.90 euros.
Je remercie AMI & Gilles Dumay pour ce service presse.

De quoi ça parle ?
Andrea Cort est avocate et travaille pour le Corps Diplomatique de la Confédération homsap dont elle est la propriété depuis un massacre perpétré par elle dans son enfance. Criminelle de guerre, c’est elle qu’on envoie traiter les affaires difficiles où elle est en contact avec des races extra-terrestres plurielles qui vont toutes, à leur manière, lui donner du fil à retordre.

Je précise que ce résumé maison ne rend pas justice à la qualité des textes lus. J’espère que ma chronique le fera. De plus, j’ai décidé de la couper en deux pour vous parler d’abord des quatre nouvelles et ensuite du roman, dans un billet futur.

Qui est Andrea Cort ?
Il me semble important, avant de vous parler des nouvelles, de glisser quelques mots au sujet de (l’anti ?) héroïne d’Adam Troy-Castro. Andrea Cort est une avocate qui travaille pour le Corps Diplomatique de la Confédération homsap qui reprend tout un tas de planètes et de gouvernements aussi divers que variés. Elle n’a pas vraiment le choix puisque, dans son enfance, elle a participé à une forme de génocide (les détails sont dévoilés petit à petit dans les différents textes avant d’être révélés noir sur blanc au début du roman) et ce métier lui permet de ne pas être extradée sur des mondes qui souhaitent la condamner. Elle a toutefois été en emprisonnée / étudiée jusqu’à sa majorité et cela a forcément laissé des traces.

Andrea Cort est une femme complexe qui a en horreur les planètes et n’aime pas beaucoup l’espèce humaine, ou n’importe quelle autre espèce en réalité. Solitaire, froide, cynique, elle pourrait aisément devenir un cliché sans la manière dont l’auteur la met en scène, n’hésitant pas à montrer ses failles, ses traumatismes, ses faiblesses aussi. Andrea Cort est un échantillon d’humanité dans tout ce que ce terme a de paradoxal : elle se hait pour les actes commis par le passé, a souvent des pulsions suicidaires qu’elle ne concrétise pas, et sait qu’au fond d’elle, elle appartient à la classe des monstres qu’elle chasse pourtant. Pourquoi un monstre ? Parce qu’elle a adoré tuer, elle s’en rappelle, et n’hésite pas à recommencer si la situation l’exige.
Pourtant, impossible de ne pas ressentir de compassion pour elle (ça ne lui plairait pas du tout, si elle le savait !), de ne pas chercher à se mettre à sa place ou même à la défendre quand l’occasion se présente. J’ai particulièrement apprécié ces nuances qui participent à la force des différents récits dont je vais à présent vous parler un peu plus dans le détail.

Avec du sang sur les mains ( lecture le 5 janvier 2021)
Andrea Cort se trouve sur la planète du peuple Zinn, une espèce alien en voie d’extinction avec qui elle négocie l’acquisition d’un prisonnier. En effet, ces aliens souhaitent recevoir un tueur humain sur leur territoire afin de l’étudier et Andrea Cort doit s’assurer que tout est en ordre à ce niveau, que les mesures de sécurité seront bien respectées, etc.

Au tout début de la nouvelle, Andrea rencontre l’équivalent d’une enfant, Première Offerte (c’est son nom humanisé, la langue des zinns n’est pas aisément prononçable) avec qui elle a un échange oral a priori quelconque. En tant que lectrice, je n’ai pas tout de suite compris où l’auteur voulait en venir puisque, comme Andrea et le reste du corps diplomatique, je me suis laissée berner…. Jusqu’à comprendre. Et là, premier choc, première grosse claque qui arrive sur les ultimes lignes de la nouvelle. J’ai eu besoin de dormir dessus pour laisser ce texte s’imprégner de toute sa puissance et j’ai entamé la suite avec un peu de crainte. L’auteur réussirait-il vraiment à faire mieux que ça ? Une partie de moi a envie de tout dévoiler pour vous expliquer mais si vous ne devez lire qu’un seul texte, lisez celui là, qui en plus est proposé gratuitement par l’éditeur pendant une durée limitée, au format numérique.

Une défense infaillible (lecture le 6 janvier 2021)
Contrairement à la précédente, cette nouvelle propose d’une part, une alternance de point de vue entre Andrea Cort et Tasha Coombs (sur qui je vais revenir) mais également une narration à la première personne pour ce qui est d’Andrea. Tasha Coombs est un agent infiltré dans une administration qui transmet des informations secrètes aux ennemis de la Confédération. Tasha doit démasquer l’espion ou l’espionne et subit une agression alors qu’elle est sur le point d’y parvenir.

Une chance, elle portait un système qui la plonge dans une sorte d’illusion dont on ne peut pas la sortir sans un mot de passe, la rendant impossible à interroger pour l’ennemi. Une fois récupérée par son camp, toutefois, on se rend compte qu’elle a modifié son mot de passe à la dernière minute parce qu’apparemment, l’ennemi en aurait eu vent, et on sollicite l’aide d’Andrea Cort puisque l’image figée dans le cerveau de Tasha est un portrait d’Andrea…

C’est l’occasion de voir notre anti-héroïne interagir avec des collègues. Cela permet également de montrer pour quelle raison elle ne développe pas de relations sur un plan personnel. Si j’ai trouvé l’intrigue de la nouvelle plus classique et n’ai pas eu l’effet « wahou » du premier texte, j’ai tout de même apprécié cette lecture pour son amertume et sa conclusion.

Les lâches n’ont pas de secret (lecture le 7 janvier 2021)
Andrea est envoyée sur Caithiriin où un ancien membre du corps diplomatique a commis plusieurs vols et un meurtre. Selon les lois inter-espèces, il doit être jugé selon la justice Caithiriin et condamné à mort sauf qu’au sein de ce peuple, la peine de mort est particulièrement violente et douloureuse : le condamné est allongé, on met une planche sur lui ainsi qu’un récipient qu’on remplit d’eau et qui va petit à petit l’écraser. Certaines exécutions durent des jours et ça terrifie bien entendu l’accusé, Varrick, qui tente le tout pour le tout en révélant à Andrea que les Caiths possèdent une méthode alternative de punition qui consiste en une forme de reprogrammation pour empêcher tout crime d’être reconduit.

Andrea va donc enquêter pour comprendre d’une part pourquoi on n’a pas proposé cette solution à Varrick et d’autre part, pourquoi la plupart des Caiths choisissent la mort plutôt que cette reprogrammation. Le contenu de cette nouvelle est assez terrifiant sur ses implications judiciaires et sociales et fait vraiment froid dans le dos. Le texte contient également un retournement de situation très inattendu qui se résout un peu facilement à mon goût mais n’en reste pas moins intéressant.

Démons invisibles (lecture le 8 janvier 2021)
Comment confier un meurtrier à la justice quand l’espèce dont viennent ses victimes ne possède pas de système judiciaire ? C’est cette question que va devoir résoudre Andrea Cort dans cette nouvelle. Emil Sandburg a commis plusieurs meurtres sur des représentants d’une espèce avec laquelle un Premier Contact a eu lieu, sans résultat. Cette espèce existe sur une planète où il n’y a aucune prédation, elle n’est pas sensible à son environnement et ne semble même pas avoir conscience de la présence des différentes espèces extra-terrestres autour d’elle.

Dés lors, comment constituer un jury et nommer un juge au sein de cette espèce, comme l’exigent les lois interespèces ?

Démons invisibles est un texte très fin, intelligent et personnel également vis à vis du personnage d’Andrea, à l’instar du précédent. Quand on entame la lecture du roman, on se rend compte à quel point il va jouer un rôle important. J’ai beaucoup aimé la maitrise dont elle fait preuve pour trouver une astuce qui respecte les attentes de ses supérieurs, ce qui démontre une fois de plus et si c’était nécessaire, ses grandes capacités professionnelles.

D’autres avis : Au pays des cave trolls (nouvelles) – Apophis (nouvelles) – Les lectures du Maki ( pour Avec du sang sur les mains) – Lutin 82 (pour Avec du sang sur les mains, une défense infaillible, les lâches n’ont pas de secret, démons invisibles) – Gromovar – De l’autre côté des livres (nouvelles et roman)

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#ProjetOmbre : chez quel(s) éditeur(s) lire du format court ?

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Il y a quelques jours, je lançais le #ProjetOmbre (saison 2 du #ProjetMaki) qui consiste à lire un maximum de format court, de manière régulière, sur l’année 2021. Je me suis rendue compte, lors de ma première participation au challenge, qu’il n’est pas toujours aisé de savoir vers quel éditeur se tourner pour trouver des textes qui collent autant au challenge qu’à nos goûts et cette liste a pour but de vous aider. Elle est vouée à évoluer tout au long de l’année, non seulement par vos apports (n’hésitez pas à me dire ce que j’ai oublié dans les commentaires !) mais aussi au fil de mes propres découvertes.

Je précise également qu’Anne-Laure du blog Chut Maman Lit ! a proposé une liste semblable à celle-ci pour le #ProjetMaki donc n’hésitez pas à y jeter un œil.

Quelques précisions :
-La liste n’est pas organisée par ordre alphabétique ou de préférence mais plutôt par ordre de ce qui m’est venu quand je l’ai rédigée. Je sais, ma rigueur laisse à désirer. 
-La liste contient des maisons d’édition qui ont pour habitude de publier régulièrement ou des nouvelles ou des anthologies et / ou qui ont une collection dédiée. Je sais qu’il y a des recueils disponibles ponctuellement chez d’autres éditeurs mais ce serait vraiment compliqué de tout référencer ici sans que l’article ne devienne imbuvable… N’hésitez toutefois pas à les signaler en commentaire pour celles et ceux qui le souhaitent 🙂
-Je vous mets chaque fois le lien direct vers la boutique de l’éditeur pour vous permettre de trouver facilement chaussure à votre pied. Y’a plus qu’à cliquer.

Sans plus attendre, commençons !

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Le Bélial vous permet de lire du format court grâce à sa mythique collection Une Heure Lumière (dont j’ai déjà parlé à plusieurs reprises sur le blog) mais également grâce au Bifrost dont chaque numéro contient entre 2 et 6 nouvelles de SFFF. C’est, à mes yeux et dans mon cœur, vraiment l’éditeur incontournable d’un challenge dédié au format court. Bien évidemment, c’est tout personnel 🙂

téléchargement
Il arrive à AMI de proposer des nouvelles écrites dans l’univers des romans édités en papier. Ces nouvelles sont numériques mais rien ne vous empêche de les découvrir ! Je vous renvoie sur leur site pour trouver ces titres. De plus, au mois de Janvier 2021, va paraître Émissaire des morts qui contient 4 nouvelles en plus d’un roman court et qui permet de valider la première mission du challenge. Notez que la première de ces quatre nouvelles est disponible gratuitement en numérique. La boucle est bouclée !

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AMI n’est pas le seul éditeur à proposer des nouvelles dans l’univers de ses romans publiés. ActuSF le fait aussi et depuis plusieurs années, pour plusieurs de ses auteurs francophones. Il n’y en a pas moins de quatorze disponibles sur Emaginaire avec des textes notamment de Jean Laurent Del Socorro, Morgane Caussarieu, Alex Evans ou encore Karim Berrouka ! J’en ai déjà lu une partie et ça a été un régal à chaque fois. Sachez également que l’éditeur propose des recueils de nouvelles, y’a plus qu’a.

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Tous les ans, Livr’S Éditions propose une anthologie thématique. Il n’y en aura pas en 2021 (la pandémie a chamboulé le planning éditorial) mais il en existe déjà cinq avec chaque fois une petite dizaine de textes et presque exclusivement des auteurs et autrices francophones. Ces anthologies existent en papier et en numérique pour certaines et je n’en parle pas parce que j’ai écrit une nouvelle dans l’une d’elle. Au passage, ma préférée est Nouvelles Eres, celle de 2020, qui propose des textes assez chouettes dans le registre de la dystopie et de la science-fiction. De plus, la maison propose aussi des novellas au prix de 10 euros qui, hélas, ne sont pas regroupées dans une collection particulière mais vous pouvez les retrouver sur le site. Il s’agit de La Mélodie, de Kidnapping et de Club 27.

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Maison découverte en 2020 pour moi, elle est spécialisée dans le format court et propose de nombreux textes d’auteurs francophones aussi divers que variés tels que Lionel Davoust, Aurélie Mendonça, Jean Laurent Del Socorro, David Bry, etc. Rendez-vous sur leur site pour découvrir leur sélection !

LogoChatNoir
Presque tous les ans depuis leur existence, les éditions du Chat Noir propose également des anthologies thématiques. Je vous en a déjà évoqué certaines sur le blog dont l’excellente Montres Enchantées. D’autres ne sont plus disponibles mais je sais que notamment cette année, leur anthologie anniversaire est prévue au programme et elle aura pour thème le chiffre « 9 ». À surveiller donc !

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La maison d’édition Rivière Blanche est connue pour proposer plusieurs anthologies à leur catalogue. Je n’ai pas encore eu l’occasion d’en lire mais voilà une piste sérieuse si vous aimez les antho’ !

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À l’instar de sa voisine du dessus, les éditions Luciférines sont connues dans le milieu de l’imaginaire pour proposer des anthologies thématiques dont celle sur les Démons Japonais qui me fait de l’œil depuis longtemps ou encore la Belle Époque. En plus, les prix sont vraiment abordables en papier comme en numérique.

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Elenya éditions est une maison qui publie des anthologies, souvent liées au Salon Fantastique d’ailleurs mais pas uniquement si je ne me trompe pas. Les thèmes sont multiples, allant de la fantasy au super-héros, en passant par l’horreur fantastique. Franchement, il y a largement de quoi se faire plaisir dans ces anthologies et avec de très beaux noms qui plus est.

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Mnémos est une maison qu’on ne présente plus et qui s’occupe, chaque année, d’éditer l’anthologie thématique du salon des Imaginales. La première remonte à 2009, il y a donc de quoi faire même si, attention, certaines sont en rupture de stock ou uniquement disponibles sur les salons.

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Maison d’édition que je découvre grâce à une recommandation sur Twitter, le passager clandestin propose une collection intitulée Dyschroniques qui se dédie à la nouvelle et, plus spécifiquement, des nouvelles de science-fiction et d’anticipation.

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Autre maison d’édition que je découvre via une recommandation sur Twitter : ArchéoSF, un label de Publie.net qui met à disposition des textes au format court issu de la science-fiction ancienne donc 19e, 20e siècle. On trouve sur leur site des textes courts mais également des feuilletons ! Certains sont en accès libre via l’onglet textes en ligne et je sens que je vais passer du temps sur ce site pour trouver des textes sympas à faire lire à mes étudiants. Bref, merci Zoé pour le tuyau !

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Encore une chouette recommandation via Twitter : les éditions YBY qui propose de la littérature inclusive et met en avant la diversité dans la fiction. Il n’y a pas que du format court chez eux mais ils ont plusieurs collectifs à leur catalogue avec des textes très prometteurs. 

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Nutty Sheep est une maison d’édition déjantée à la folie assumée qui est connue pour ses anthologies thématiques et son fameux logo mouton. Vous aurez largement le choix dans leur catalogue, en format papier comme numérique, pour trouver des textes qui vous intéressent : parodie, science-fiction, fantastique, fantasy, il y en a pour tous les goûts !

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Je n’avais jamais entendu parler auparavant de Nitchevo (une fois de plus, merci à Zoé !) pourtant ils rééditent actuellement toute l’oeuvre de Léa Silhol au sein de laquelle on retrouve énormément de nouvelles et d’anthologies. Ça peut être une très bonne piste si vous souhaitez, en prime, découvrir cette autrice !

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Enfin, dernier et non des moindres… Je sais que j’ai dit au début de l’article que je me concentrais sur les éditeurs qui ont des collections dédiées au format court mais je ne peux pas achever cette liste sans évoquer l’Atalante qui, outre l’excellentissime « Apprendre si par bonheur » de Becky Chambers, traduit également d’autres novellas comme celles de Martha Wells qui font forte impression sur la blogosphère. De plus, les deux derniers « tomes » du Vieil Homme et la Guerre de Scalzi sont aussi construits comme des recueils de nouvelles. 

Vous connaissez d’autres maisons d’édition qui pourraient entrer dans cette liste ? N’hésitez pas à les renseigner en commentaire !

(dernière mise à jour : 07/01/2021
À rajouter : Noir d’absinthe, les saisons de l’étrange, le Grimoire, Malpertuis, les Vagabonds du Rêve, Realm et Short éditions)

BML #26 – août 2020

Bonjour à tous !
Qui dit 1er du mois dit jour de bilan et il y en a des choses à dire sur ce mois d’août, littérairement parlant en tout cas.

Côté romans :

L’Imparfé #1 – Johan Heliot (Gulf Stream – SP)
Sept Redditions – Ada Palmer (Le Bélial – ♥)
Les derniers des branleurs – Vincent Mondiot (Actes Sud Jr – ♥)
Nixi Turner #5 – Fabien Clavel (Chat Noir)
La dernière colonie – John Scalzi (L’Atalante – SP)
L’hypothèse du lézard – Alan Moore & Cindy Canévet (ActuSF)
Zoé – John Scalzi (L’Atalante – SP)
Vaisseau d’Arcane #1 – Adrien Tomas (Mnémos – SP)
Quitter les Monts d’Automne – Émilie Querbalec (Albin Michel Imaginaire – SP)
Bénies soient vos entrailles – Marianne Stern (Chat Noir – SP)
Apprendre, si par bonheur – Becky Chambers (L’Atalante – SP – chronique à venir)

C’est donc 11 romans que j’ai découvert au mois d’août et pour la plupart, ce furent plutôt de bonnes lectures avec des valeurs sûres : Scalzi, Palmer, Mondiot, Tomas, difficile d’être déçue par ces auteurices. Il y a quand même eu quelques titres moins enthousiasmants mais dans l’ensemble, je suis assez contente de ce que j’ai pu lire avec deux coups de coeur dont un inattendu. Ça fait du bien, vu les derniers bilans mensuels !

Côté mangas :

Gewalt (trilogie)
Sun Ken Rock #1
Sayonara Miniskirt #1
GTO Paradise Lost #12

Niveau manga, par contre, le bilan n’est pas terrible. Si je vous prépare un article très enthousiaste sur Sayonara Miniskirt, je garde un sentiment mitigé à propos de Gewalt (sympa mais sans plus). De plus, j’ai détesté ma prise de contact avec Sun Ken Rock. J’attendais totalement autre chose de ce manga encensé par tous. J’ai presque cru à une mauvaise blague collective ^^’ Enfin, ça arrive ! J’ai également continué ma lecture de GTO Paradise Lost et je dois avouer avoir ressenti une certaine lassitude couplée à un désintérêt pour l’histoire. Déjà, les tomes mettent énormément de temps à sortir donc j’ai oublié une bonne partie de l’intrigue. Ensuite, j’ai détesté (mais genre, vraiment détesté) le dernier chapitre qui présente le nouveau prof « Animal Joe ». Ce personnage me donne envie de vomir et je ne vois pas du tout l’intérêt de la scène course poursuite en voiture avec sa maîtresse en chaleur au téléphone (je vous passe les détails pour les plus jeunes et j’en profite pour m’excuser du terme crû « en chaleur » sauf qu’il n’y a vraiment aucune autre expression pour la décrire, on se croyait dans un hentaï presque). C’est beauf, vulgaire, bref ça m’a saoulée. Pourtant je sais que dans un GTO on a toujours une dose de vulgarité mais là, Onizuka craignait dans ses réactions et ce nouveau personnage aussi. Je pense m’arrêter là pour ce titre et j’en suis la première déçue.

Ce qui fait 6 mangas en tout.

Côté « autre »
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J’ai entamé la lecture du nouveau livre de Max Bird ! Il est vraiment très sympa, bourré d’humour et d’informations intéressantes. Je ne sais pas encore si je vais lui consacrer un article une fois à la fin (je lis par petits bouts) mais je le recommande vivement.

Petit bonheur du mois :
Les petits bonheurs du mois est un rendez-vous initié par le blog Aux Petits Bonheurs qui consiste à mettre en avant les moments positifs de la vie. Sauf que j’avoue, ce mois-ci… C’est plutôt compliqué hormis concernant le début des précommandes pour mon nouveau roman : Clément Coudpel contre les spectres de Samain (toujours en cours jusqu’au 10 septembre). C’est une nouvelle aventure littéraire qui commence pour moi et je regrette qu’elle se lance dans une période si compliquée pour le milieu culturel. Toutefois, j’ai été très agréablement surprise du soutien et du suivi de ma communauté de lecteurs que j’en profite pour remercier ici ♥

Et voilà, ce bilan arrive déjà à son terme ! J’espère que votre mois d’août a été agréable et je vous souhaite une belle rentrée 🙂

Quitter les Monts d’Automne – Émilie Querbalec

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Quitter les Monts d’Automne
est un one-shot de science-fiction écrit par l’autrice française Émilie Querbalec. Publié par Albin Michel Imaginaire, vous trouverez ce roman partout en librairie à partir du 2 septembre 2020 pour la rentrée littéraire.
Je remercie chaleureusement Gilles Dumay et Albin Michel Imaginaire pour l’envoi de ce service presse numérique.

De quoi ça parle ?
Kaori nous raconte son histoire qui commence en 13111 sur la planète Tasai. Kaori est la dernière descendante d’une ligne de conteuses. Malheureusement, elle n’a pas été frappée par le Ravissement et ne possède donc pas le don du Dit. Devenue danseuse, elle hérite à la mort de sa grand-mère d’un rouleau calligraphié. Tabou ultime dans cette société où l’écriture est passible de mort ! Kaori va alors entamer une quête de ses origines qui l’emmènera loin, très loin, dans le temps et l’espace.

Un univers riche où prime la transmission orale.
C’est ce premier point qui a d’abord attiré mon attention en lisant la quatrième de couverture puisqu’on y dépeint une société d’inspiration japonaise (je vais y revenir plus bas) où tout se transmet à l’oral, l’écrit étant frappé d’interdit. En tant que lectrice et qu’autrice, c’est un concept qui me parle et m’intrigue forcément puisque j’en suis venue à imaginer ma propre existence sans trace écrite. Prenez quelques minutes pour vous plier à l’exercice, c’est plutôt effrayant.

Sur Tasai, il existe des lignées de conteurs et conteuses, des personnes gratifiées d’un Don (qu’on appelle le Dit) suite à un Ravissement. Ces gens sont capables de raconter des histoires issues du Flux. Le Flux, c’est… compliqué. Une sorte de force supérieure, presque divinisée sur Tasai, qui est partout et régit d’une certaine manière les existences de tous à travers sa police spéciale de moines, pour ne citer qu’eux. Notez que je schématise très grossièrement ici pour éviter de divulgâcher.

Appartenir à l’une de ces prestigieuses lignées de conteurs ne garanti en aucun cas qu’on sera touché par le Dit : à son grand désespoir, Kaori, l’héroïne, n’a pas connu le Ravissement et doit se rabattre sur l’art de la danse qu’elle apprend à maîtriser à force de patience et de travail. Cela lui vaudra la possibilité de rejoindre une troupe prestigieuse à la mort de sa grand-mère, qu’elle servait jusque là lors de ses représentations.

Au moment du décès susmentionné, Kaori va découvrir dans les affaires de sa grand-mère un drôle de cylindre contenant… des écrits. Elle sera tentée de les détruire mais le cylindre lui parle avec la voix familière de la défunte, lui assurant que si l’objet ne s’est pas détruit à son contact, alors il lui est bien destiné. Forte de ce mystère, la jeune fille va entreprendre un voyage jusqu’à Pavané -la capitale du coin- pour retrouver un ami de sa grand-mère qui, elle l’espère, sera capable de l’éclairer. Évidemment, tout ne va pas se passer aussi simplement…

Une inspiration japonaise dans un univers science-fictif.
L’univers développé par Émilie Querbalec fleure bon le Japon, que ce soit sur son contenu ou son esthétique. Les Monts d’Automne ne sont pas sans rappeler le pays du Soleil Levant en mettant en scène des traditions et tabous qu’on peut retrouver (pour partie au moins avec certitude) dans l’Histoire nippone préindustrielle. Ça a d’ailleurs constitué ma première surprise puisque je m’attendais à lire un texte de science-fiction (avec tout ce que ça implique comme attentes pour une novice dans le genre comme moi) pour me retrouver, au départ, dans un monde très nippo-traditionnel. L’aspect technologique, vaisseaux spatiaux etc. arrive petit à petit, à mesure que Kaori quitte justement les Monts d’Automne pour la capitale avant de s’éloigner définitivement de sa planète d’origine. L’autrice prend son temps pour installer l’ambiance et apporte cette science-fiction par petites touches. Ainsi, Émilie Querbalec accompagne son lecteur dans la transition avec, je dois dire, un certain brio. Cela fait de son roman une très bonne porte d’entrée pour les novices qui aimeraient s’initier à ce genre mais craignent de se perdre. Quitter les Monts d’Automne peut donc être qualifié de texte initiatique, dans tous les sens du terme.

À mesure que l’histoire se déploie, l’aspect japonisant recule sur l’esthétique purement visuelle pour apparaître davantage dans les échanges philosophiques mais également sur les passages érotisés par l’autrice qui ont lieu à certains endroits du texte. Notez que ces moments ont une utilisé et je n’ai, personnellement, jamais eu le sentiment de tomber dans le voyeurisme vulgaire.

Kaori, une héroïne assez passive.
Émilie Querbalec opte pour une narration à la première personne avec une vraie maîtrise de son style d’écriture. Ce que je lis souvent comme reproche pour ce type de choix narratif, c’est la familiarité régulièrement induite dans le style littéraire de l’auteur qui s’appauvrit, comme s’il n’était pas possible de narrer des évènements depuis l’esprit d’un personnage sans tomber dans cette facilité. Qu’on se comprenne : certaines histoires le justifient par leur personnage principal, mais pas toutes. Dans Quitter les Monts d’Automne, la question ne se pose pas puisqu’on comprend, une fois à la fin, que Kaori écrit son histoire après coup, après avoir eu accès à une forme d’éducation et de développement personnel. Cela justifie l’attention portée à l’ambiance, aux décors, l’embellissement de certaines scènes aussi puisque l’autrice dépeint finalement une mémoire avec ses travers. J’ai trouvé cette façon d’opérer vraiment brillante et agréable à suivre en tant que lectrice et ce même quand Kaori en elle-même manque un peu d’intérêt face aux personnages intrigants avec lesquels elle interagit durant son périple.

L’héroïne reste globalement plutôt en retrait pour un roman qui se veut initiatique. Elle agit à quelques reprises mais subi beaucoup les évènements. Cela implique des passages qui souffrent de quelques longueurs, notamment sur la dernière partie et ce à l’exception de la conclusion qui se révèle aussi intéressante qu’enthousiasmante.

La conclusion de l’ombre :
Quitter les Monts d’Automne est un récit initiatique qui fleure bon le Japon, autant sur son esthétique visuelle que sur sa philosophie et ses passages érotiques. Dans une narration à la première personne, le lecteur est invité à suivre Kaori dans un monde où l’écrit est un tabou passible de mort. Ce texte est une belle réussite que je recommande chaudement, même et surtout (mais pas que) aux novices du genre science-fiction puisqu’il se veut également initiatique à ce niveau.

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