Fragments et cicatrices est un recueil de nouvelles écrites par l’autrice française Sophie Dabat. Publié aux éditions du Chat Noir dans la collection Griffe Sombre, vous le trouverez sur leur boutique au prix de 19.90 euros.
De quoi ça parle ?
À travers quinze textes qui s’inscrivent dans différents genres de l’imaginaire, l’autrice met en scène des femmes. Des femmes ordinaires, des femmes mythiques, des déesses oubliées, des créatures surnaturelles, des femmes qui essaient de se battre pour leur droit à être ce qu’elles désirent.
Un recueil aux genres pluriels.
Fragments et cicatrices ne s’inscrit pas dans un seul genre littéraire et ça a été ma première surprise. Puisqu’il était publié au Chat Noir en 2014, je m’attendais à lire des nouvelles appartenant toutes au registre du fantastique mais la plupart tiennent plutôt de la fantasy et même, pour deux d’entre elles, de la science-fiction. Ce sont des genres quasiment absents du catalogue de cet éditeur (totalement même en ce qui concerne la SF). Ce n’est pas un problème mais je ne m’y attendais pas et cela a participé à la richesse thématique du recueil. Je dois aussi préciser que certaines de ces nouvelles ne sont pas inédites et ont été publiées dans des revues comme le Calepin Jaune, Lanfeust Mag, Caprophanaeus, Éclats de rêve, Station fiction, Dragon et Microship ou Notes et Merveilles. J’avoue humblement n’en connaitre aucune. Du coup, six textes seulement sont inédits pour le Chat Noir.
Je ne vais pas m’attarder sur chaque texte de manière individuelle mais sachez que vous allez trouver, en vrac : une chevalière, une nécropasseuse, une polymorphe, une vampire, une sorcière, une Parque et bien d’autres. Aucun texte ne ressemble au précédent ce qui fait que je n’ai jamais ressenti de lassitude ou de redondance. Il y en a vraiment pour tous les goûts et je vous propose de mettre en avant les trois qui m’ont le plus touchée en tant que lectrice.
Je précise aussi que sur les 15, je n’ai pas achevé la lecture de deux textes parce qu’ils ne correspondaient pas trop à ce que j’avais envie de lire sur le moment, ce qui fait que je n’en compte « que » 13 pour le #ProjetOmbre.
Hamadryade
Hamadryade raconte l’histoire d’un arbre à travers le temps et de l’esprit féminin qui l’habite. On le suit depuis sa naissance il y a deux millénaires jusqu’à sa fin dans un futur pas si lointain. On voit l’évolution des hommes, de leurs croyances, de leur rapport à la nature, la cruauté de certains actes et de certains modèles de pensées. L’autrice le met en scène à travers les échanges et les liens que la hamadryade va tisser avec eux. J’ai été très touchée par cette nouvelle au ton résolument pessimiste qui, pourtant, est bien trop d’actualité. Un petit bijou !
Réminiscences
Nolwenn doit écrire une rédaction en français autour du thème du dragon et on ne peut pas dire qu’elle soit très inspirée… Elle s’endort et rêve qu’elle est une dragonne, libre et forte, pourtant pourchassée par les hommes qui lui volent de plus en plus de territoire. Les deux situations sont évidemment liées… Même si le thème de la transformation en créature mythique reste assez classique, je trouve que l’autrice a bien retranscrit l’aspect métamorphose et force féminine notamment face aux parents démissionnaires (père violent, mère victime). En quelques pages, Sophie Dabat aborde beaucoup de thèmes sans que ça ne paraisse lourd ou fourre-tout. Toutefois, j’ai tellement apprécié le principe que j’aurais aimé un texte plus long, plus développé, où j’aurais pu retrouver Nolwenn. Il y avait ici de la matière à écrire un bon roman.
La femme diamantée
Cette nouvelle raconte l’histoire d’une dame âgée qui chute sur un trottoir dans l’indifférence générale et se blesse au bras. Le début du texte a provoqué en moi un profond sentiment de révolte mêlé à de la compassion pour cette pauvre femme que personne ne s’arrête pour redresser et ce pendant plus d’une heure. Le pire c’est que je suis certaine que ça doit arriver tous les jours… La nouvelle se poursuit en montrant les soucis de santé qui découlent de cet accident ainsi qu’une mystérieuse transformation qui va s’opérer dans le corps de cette dame. L’autrice choisit ici d’écrire comme un enchaînement d’instantanés. Des situations courtes, parfois de quelques lignes, un dialogue ou l’autre, qui avancent dans le temps au fil des mois pour montrer l’évolution de cette pathologie. C’est la phrase de conclusion prononcée par le prêtre qui m’a vraiment touchée et m’a donné envie de sourire durablement. Une très belle réussite avec beaucoup de sensibilité et de subtilité.
La conclusion de l’ombre :
Fragments et cicatrices est un recueil de nouvelles fantastiques, fantasy et de science-fiction toutes écrites par l’autrice française Sophie Dabat. Leur autre point commun est de mettre en scène des personnalités féminines dans des situations très diverses, parfois avec des réécritures de mythe, parfois des femmes ordinaires, qui ont toutes un but et une existence propre. L’autrice maîtrise parfaitement le genre de la nouvelle (ce qui n’est pas toujours le cas partout hélas) et c’est un régal à découvrir ! Voilà un recueil tout à fait recommandable.

Septième lecture – Défi « contes fantastiques »
(lire un recueil de nouvelles)

+13 nouvelles
Avancée du challenge : 22 nouvelles lues)
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Je prends bonne note. Je ne suis pas très recueil de nouvelles (d’où ma non-participation au projet Ombres d’ailleurs) mais quand c’est de qualité, je me dis que ça vaut le coup de s’y plonger.
Je comprends totalement, ce n’était pas quelque chose qui me plaisait non plus. Ni ça, ni les nouvelles, mais grâce au Maki j’ai découvert des textes qui m’ont fait changer d’avis et ce recueil aurait pu en faire partie si je l’avais lu plus tôt ! Il trainait depuis un moment dans ma PàL ^^’
Je suis contente de te faire découvrir quelque chose en tout cas 🙂
Excuse moi j’ai reecrit mon commentaire, car je l’avais pas vu apparaître . Il faut que je pense que sur ton blog le commentaire s’affiche en tête.
Pas de soucis 🙂 en effet les nouvelles ne sont pas reliées entre elles ce que je préfère aussi personnellement ! Il y en a vraiment pour tous les goûts.
Intéressant. Je note ces nouvelles qui sont indépendantes il me semble et qui posent un questionnement.
J’ai pris goût aux nouvelles personnellement et celles ci posent un questionnement qui est intéressant. Souvent l’auteur crée un lien entre les nouvelles. Là ça semble pas être le cas. Je préfère .
Je ne me serais pas non plus attendue à trouver de la science-fiction dans un livre de la maison d’édition !
Quand je commencerai le recueil, je pense lire en priorité La femme diamantée, parce que ce que tu en dis m’interpelle que ce soit sur la situation de départ tristement réaliste ou cette idée d’instantanés comme base d’écriture.
Quant à la maitrise du genre par l’autrice, j’en suis ravie parce que pour moi, c’est un format extrêmement compliqué et qu’un très bon auteur de romans n’est pas forcément un bon auteur de nouvelles.
J’espère que tu aimeras la femme diamantée du coup 🙂
Et je suis bien d’accord avec toi, il y a des auteurs que je préfère lire en roman et qui sont très mauvais en format court hélas. C’est un exercice d’écriture totalement différent…
Et hélas sous-estimé, du moins en France, parce qu’il me semble qu’aux USA, il y a un vrai engouement autour des nouvelles et une juste reconnaissance…
Je trouve que c’est en train de revenir petit à petit dans notre paysage éditorial même si ça prend du temps. Grâce à des initiatives comme les UHL du Bélial par exemple 🙂 mais c’est encore trop de niche, d’où le projet maki devenu projet ombre d’ailleurs car ça a été une vraie révélation pour moi.
Oui, on en avait parlé et je te rejoins 🙂
Quant à ta reprise du projet, j’avoue que ça a boosté ma participation et motivation, notamment en raison de l’ouverture sur tous les genres que tu as amorcée.
J’en suis très contente ☺️ je pense que mettre l’imaginaire en avant c’est important mais cela ne signifie pas pour autant que le reste doit être occulté.
Tu as raison, d’autant que ça peut ouvrir le challenge à un nouveau public…